Pour la première fois depuis sa nomination à la tête de Ferrari, Frédéric Vasseur a livré ses premières impressions aux médias. L’occasion pour le Français d’évoquer son arrivée chez les Rouges, ses premiers jours à Maranello et les deux pilotes de l’équipe.
En quelques semaines, le statut de Frédéric Vasseur a changé. Figure emblématique du paddock depuis des années, le Français se retrouve sous le feu des projecteurs depuis sa nomination à la tête de Ferrari. L’ancien patron d’Alfa Romeo sait pourquoi il est là : être au sommet de l’élite mondial. « Je suis convaincu qu’avec la Scuderia aujourd’hui – et mon expérience est limitée qu’à mes deux premières semaines ici – nous avons tout pour gagner. » Le natif de Draveil (Ile-de-France) attaque le plus grand défi de sa carrière avec de l’optimisme.
Pas de discussion avant Abu Dhabi
Lors des dernières semaines de la saison 2022, le monde de la Formule 1 savait que la position de Mattia Binotto était fragilisée. Sur la sellette, le directeur de Ferrari tentait de garder espoir. Mais ses erreurs à répétitions, sa gestion difficile des crises et une relation de plus en plus tendue avec Charles Leclerc ont mis fin à sa collaboration avec le cheval cabré. Bien avant cette annonce officielle, le nom de Frédéric Vasseur avait déjà été cité. Pour autant, en interne, aucune discussion n’avait eu lieu.
« Bien qu’on en ai parlé dans la presse avant la finale de l’année précédente, nous n’avions pas échangé sur ce sujet (une place chez Ferrari), révèle le nouveau directeur. Nous avons parlé pour la première fois la semaine après Abu Dhabi. Tout s’est fait rapidement. J’ai eu un appel avec Mattia Binotto, même s’il n’était plus là. Je le remercie pour ça, j’ai vraiment apprécié le fait qu’il reste, m’attend et discute avec moi. »

Fair-play, Mattia Binotto n’a pas oublié tout ce que la Scuderia lui avait apporté. A la recherche d’un nouveau patron d’écurie, le directeur Général de Ferrari, Benedetto Vigna, a choisi de faire confiance à l’ancien directeur d’Alfa Romeo. « J’ai une relation très privilégiée avec Benedetto, reconnaît Frédéric Vasseur. Je mange avec lui deux ou trois fois par semaine et on s’est au téléphone tous les jours. J’ai la délégation de diriger l’équipe et je le ferai comme je le veux. Nous avons échangé fréquemment avec Benedetto et John Elkann (président) pour discuter des points clés. Tout est clair et ça marche parfaitement. »
Choisi par les hauts dirigeants de Ferrari, le Tricolore semble déjà faire l’unanimité et avoir les cartes en mains pour faire ce dont il a envie au sein de l’écurie de Maranello.
Le changement prend du temps
Bien qu’il soit libre de diriger comme il l’entend, tout n’a pas changé du jour au lendemain chez Ferrari. A l’usine de Maranello, Fred Vasseur a conscience qu’il ne faut ni sauter les étapes, ni tout révolutionner d’un coup mais plutôt imposer sa patte petit à petit. « Sur certains sujets, la transition est un long processus. Je parle notamment du moteur, je ne suis là que depuis deux semaines donc je pense que tout est sous contrôle. Ce qu’ils ont fait depuis des mois semble être du bon travail.
Le développement est souvent fait de choix stratégiques importants, surtout maintenant avec les limites budgétaires. Il faut décider si tu te concentres plus sur la voiture de l’année suivante ou sur celle en cours. Je n’étais pas là et je ne sais pas ce qu’il s’est passé avant donc je ne vais pas juger. Nous verrons ce que cela va donner pendant la saison. »
Arrivé trop tard pour participer à la conception entière de la Ferrari version 2023, Frédéric Vasseur fait entièrement confiance aux ingénieurs italiens. Bien qu’elle soit en retrait ces dernières années, la Scuderia reste l’écurie la plus mythique de l’histoire de la Formule 1. On ne reste pas au sommet pendant des années sans avoir une bonne méthode de travail et des gens compétents.
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« Ce serait arrogant de ma part d'apporter des changements à l'organisation technique après deux semaines de travail. Nous avons des discussions sur la façon dont nous pourrions améliorer le système, quelles sont nos faiblesses et comment faire un meilleur travail. Mais c'est plus un processus de continuité que d'aller vers de grands changements qui, de mon point de vue, n'auraient pas de sens. Les gars qui sont en place essaieront de faire du mieux qu'ils peuvent, et c'est à moi de les mettre dans les meilleures conditions possibles pour faire le travail. Ensuite, il pourrait être temps, après quelques semaines ou quelques mois, d'agir si les choses ne fonctionnent pas. Mais je leur fais confiance. La Formule 1 est en constante évolution, nous ne pouvons plus travailler comme il y a dix ou vingt ans. Nous devons nous concentrer sur notre job, notre performance et tout sera possible ! »
Leclerc – Sainz sur un même pied d’égalité
Pour rêver de remettre Ferrari sur le toit du monde, Frédéric Vasseur peut s’appuyer sur un tandem de pilotes très talentueux. Le Tricolore va retrouver Charles Leclerc. Le Monégasque avait fait ses grands débuts en F1 chez Alfa Romeo en 2018, avec sous ses ordres son nouveau patron. Le duo Vasseur-Leclerc se retrouve donc au sein de l’écurie transalpine mais avec des ambitions différentes.
Le Petit Prince du Rocher est à la conquête de son premier titre mondial alors que le Français espère mettre fin à l’attente des tifosi, qui patientent depuis seize ans et le titre de Kimi Räikkönen en 2007. Même s’il a plus d’affinité avec le vice-champion du monde 2022, le patron de la Scuderia sait que les deux coéquipiers sont aussi importants l’un que l’autre. C’est pour cela qu’ils seront sur un même pied d’égalité.

« Nous avons deux très bons pilotes et tous les deux sont capables de faire le travail. Nous aurons la capacité de leur fournir exactement la même voiture, la même structure et le même support. Ce qui est clair, c'est que l'objectif est de gagner avec Ferrari et pour Ferrari. Il n'y aura pas de numéro un et de numéro deux, mais si à un moment donné je dois agir, j'agirai. Peu importe que ce soit pour l'un ou l'autre mais si je dois faire quelque chose, je le ferai. »
Car peu importe qui s’impose, il faut à tout prix le succès quand on est chez les Rouges. « Lorsque vous êtes dans une équipe de haut niveau, vous ne pouvez pas avoir d'autre objectif que la victoire à la fin de la journée. Vous ne pouvez pas commencer la saison en vous disant “d'accord, je serais content de la deuxième place”, ce serait vraiment un manque d’envie. » Ambitieux et affamé, Frédéric Vasseur sait qu’il aura la pression du résultat mais c’est aussi pour relever ce défi qu’il a signé.

Vasseur pas le remède magique contre les problèmes de stratégie
Lorsque l’on pointe les gros problèmes de Ferrari l’an passé, l’un revient très souvent : la stratégie. Trop souvent, Charles Leclerc et Carlos Sainz ont perdu des victoires et des points importants dans la course au titre à cause d’une mauvaise décision de la part des stands. Souvent décrié à cause de ça, Mattia Binotto a fait le pompier pour éteindre les polémiques liées à ces manquements. Avec l’arrivée de Fred Vasseur, les supporters de Ferrari espèrent que cela va s’arranger. Mais le Français n’est pas un magicien et cela ne dépend pas que de lui.
« Très souvent, quand on parle de stratégie, c'est beaucoup plus une question d'organisation que le gars sur le mur des stands. J'essaie de comprendre exactement ce qui s'est passé sur chaque erreur, ce qui a posé problème l'année dernière et d'essayer de savoir si c'est une question de décision, d'organisation, de communication. Le plus gros problème est la communication et le nombre de personnes impliquées plutôt que l'individu. Si vous mettez trop de monde à discuter de la même chose, quand vous aurez le résultat de la décision, la voiture sera au tour suivant ! Vous avez besoin d'un flux de discussion clair et d'un flux de communication clair entre les bonnes personnes occupant les bons postes. C'est un travail en cours. »
Espérons que cela soit réglé dès le premier Grand Prix de Bahreïn du 3 au 5 mars pour que l'ère Vasseur chez Ferrari commence par un succès et non une bévue stratégique.