Avec Solskjær à la tête de Manchester United depuis un peu plus de deux ans maintenant, il est important parfois de se souvenir de la gloire qu’il a pu apporter à ce club en tant que joueur. Aujourd’hui, on va replonger dans, sans aucun doute, son plus beau moment au club, son but à la dernière minute en finale de la Ligue des Champions 1999. Plus généralement, nous allons regarder la saison de cette grande équipe des Red Devils qui a gagné le triplé cette année-là, en concluant leur saison avec une finale historique au Camp Nou face au Bayern Munich.

Une grande équipe

La saison précédente, les Red Devils, alors entraîné par Sir Alex Ferguson, finissent 2es derrière Arsenal avec un point en moins. Sir Alex veut changer cela et reprendre le contrôle du championnat. Il fait donc venir trois nouveaux joueurs, qui iront tous les trois démarrer la finale en mai 1999 : Dwight York de Aston Villa, Jaap Stam du PSV Eindhoven et Jesper Blomqvist de Parme. Le premier marquera 48 buts en 96 matchs pour le club, Stam gardera 22 clean sheets en 79 matchs alors que le dernier n’était que recruté pour suppléer Ryan Giggs et ne laissera pas une grande marque de sa présence au club avec un seul but. L’histoire retiendra que Sherringham le remplace dans la finale avant de marquer le but de l’égalisation.

Avec sa nouvelle armada, Sir Alex et ses hommes iront gagner le championnat, avec un point d’avance sur Arsenal. La roue tourne. Avec seulement 3 défaites, de très loin la meilleure attaque du championnat avec 80 buts, et un jeu d’attaque alléchant, l’équipe de Manchester semblait impossible à arrêter. La doublette York-Cole cartonne, alimenté par Beckham, Giggs, Scholes et Nicky Butt. Derrière, malgré 37 buts encaissés en championnat, la défense était tout de même impressionnante : Gary Neville et Irwin révolutionnaient le poste de latéral, de plus en plus offensif, alors que Stam et Johnsen protégeaient l’un des meilleurs gardiens de l’histoire du championnat anglais, Peter Schmeichel. Alors que Ferguson pouvait compter sur la montée en puissance de Phil Neville et Wes Brown, il a surtout pu sauver de nombreuses situations avec Teddy Sherringham et, donc, le Baby Face Assassin (l’assassin au visage de bébé), Ole Gunnar Solskjær, le supersub par excellence. Durant son temps à Manchester, le Norvégien a marqué 28 buts en tant que remplaçant, un record du club.

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Une domination nationale

Alors que les Mancuniens ont perdu en début de saison la Community Shield face à Arsenal, (encore eux) 3-0, ils ont su se relever et aller chercher le championnat et une coupe nationale. Ils n’ont perdu aucun match entre le 19 décembre 1998 et la fin de la saison en mai 1999, gagnant 14 des 20 matches joués sur la période, dont une victoire 8-1 contre Nottingham Forest. En janvier 1999, les Mancuniens ont démarré leur campagne de FA Cup avec une victoire contre Middlesbrough, puis Liverpool. Le match se joua dans le « Fergie Time », avec des buts de York et Solskjær, encore lui, à la 88e et 90e minutes. Viennent ensuite Fulham et Chelsea, défaits 1-0 et 2-0. Arrivés en demi-finale, ils rencontrent une nouvelle fois les Gunners d’Arsène Wenger.

Après un match nul, le replay ira jusqu’en prolongation et donna lieu à un moment d’histoire. Alors bloqué à 1-1, le match changea drastiquement quand Ryan Giggs décida qu’il fallait en finir de ce suspens. Partant de sa moitié de terrain, l’allier gallois galopa jusqu’au but de David Seaman, en passant 4 joueurs d’Arsenal sur le chemin, avant de mitrailler la lucarne du portier des Gunners. Une célébration iconique verra Giggsy retirer son maillot et révéler son torse poilu en célébrant avec toute l’équipe. Wenger, classe, félicitera ses adversaires du soir « ils étaient fantastiques. Je suis très triste mais ils ont encore montré qu’ils étaient une grande équipe ».  Les Mancuniens iront gagner dans un Wembley plein 2-0 contre le Newcastle de Shearer et entraîné par Ruud Guillit.

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L’épopée européenne

Malgré une élimination très tôt dans la League Cup, les Mancuniens pouvaient aller chercher un triplé historique, qui n’avait jamais été fait auparavant. Une victoire en Ligue des champions, 31 ans après la dernière victoire du club dans cette compétition, leur permettrait de rentrer un peu plus dans l’histoire du football. Les Red Devils ont démarré la campagne en août, avec un tour préliminaire contre les Polonais ŁKS Łodz. Une victoire 2-0 à l’aller leur a donné l’avantage avant de faire match nul 0-0 au retour, et donc de continuer vers les groupes. Ce fut le seul match durant la campagne européenne où les coéquipiers de York n’ont pas marqué, une grande performance pour le club polonais.

Les hommes de Ferguson se retrouvent dans le groupe de la mort : Bayern Munich, futur finaliste, le FC Barcelone (de Luis Enrique, Rivaldo et Fígo) et les Suédois de Brøndby. Dans l’ancien format de la Ligue des champions, les seconds de groupes n’étaient pas garantis de passer et les troisièmes pas reversés en Coupe de l’UEFA. Il était donc impératif d’aller chercher un maximum de points face aux Catalans et Munichois. Les Red Devils gagnent leurs deux matchs contre Brøndby, 6 points au compteur. Lors des doubles confrontations contre le Barça et le Bayern Munich, les Anglais font match nul à chaque fois, avec notamment deux matchs qui finissent 3-3 contre Barcelone. Finissant dans la catégorie des meilleurs deuxièmes de groupe avec 10 points, les Mancuniens continuent l’aventure vers le Camp Nou, lieu de la finale en mai.

Arrive donc l’Inter de Diego Simeone sur le chemin. Beckham affronte pour la première fois l’Argentin depuis leur altercation lors de France 98, qui poussa l’Anglais à être exclu. Un doublé de passes décisives de Beckham pour York lors du match aller en Angleterre donna deux buts d’avance avant d’aller à San Siro. Le retour finit à 1-1, avec un but tardif de Paul Scholes. La génération 92 des frères Neville, Beckham, Butt, Scholes et Giggs prenait réellement le devant de la scène cette année là.

L’un des moments forts de la campagne 98-99 fut le duel contre la Juventus en demi-finale. Après un but de Pippo Inzaghi à Old Trafford, les Red Devils étaient heureux de voir Ryan Giggs égaliser à la dernière minute pour ne pas être trop désavantagés au retour, à Turin. Inzaghi, Zidane, Deschamps, Conte et Davis démarrent le match pour les Turinois, dans une soirée qui s’annonce compliquée pour Ferguson et ses hommes. Inzaghi, encore lui, marque un doublé en 11 minutes pour donner un avantage presque définitif à Marcelo Lippi, l’entraîneur de l’époque. Pour ne rien arranger, Roy Keane prend un carton, qui le suspendra pour la finale. Il trouvera tout de même le moyen de marquer de la tête pour réduire l’écart, avant que York égalise avant la pause. À la mi-temps, Manchester est qualifié, mais seulement avec les buts à l’extérieur. C’est finalement Cole qui donnera l’avantage définitif ; alors que York contourne le gardien et se fait faucher, l’arbitre laisse l’avantage et son compère d’attaque marque dans un angle fermé. Une soirée inoubliable pour les Red Devils, qui devront tout de même faire sans Scholes et Keane en finale, suspendus.

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Sur le toit du continent

Le Bayern Munich sera le dernier challenge à surmonter pour Ferguson avant de réaliser le triplé. En revoyant les images du match, on se rend bien compte que le football a bien changé depuis mai 1999. Le Camp Nou de Barcelone est complètement plein, le 4-4-2 est à la mode et pas seulement pour juste défendre, et le libéro (Matthäus) joue derrière la ligne de défense plutôt qu’en 6 juste devant. Pierluigi Collina, arbitre mythique des années 90, peut enfin officier une finale après 7 finales disputées d’affilée par des clubs italiens. Les Munichois arrivent avec une grande équipe, presque entièrement constituée d’allemands, dont nombreux vainqueurs de l’Euro 1996. Kahn contre Schmeichel, Jancker contre Stam, Linke contre Cole. Les duels étaient partout, dans une époque où le ballon passait beaucoup plus de temps en l’air qu’au sol et où on ne partait pas de derrière pour construire une attaque.

Les Allemands prennent l’avantage très tôt, dès la 6e minute, avec un but sur coup-franc de Basler, qui trompe Schmeichel côté ouvert du but. Les Mancuniens vont courir derrière le score pendant le plus clair de la partie. Cependant, Sir Alex a toujours quelque chose dans ses manches, et le Fergie Time ne s’appelle pas ainsi pour rien. Teddy Sherringham et Ole Gunnar Solskjær rentrent en deuxième période et ils changeront à eux deux le cours de ce match. Le quatrième arbitre annonce 3 minutes de temps additionnel, quelques minutes après que Jancker tire sur la barre. Corner pour Manchester, Schmeichel est dans la boîte adverse. Il est mal renvoyé, Giggs tire du droit un peu au hasard et Sherringham prolonge dans le but. 91e minute, 1-1, le match se dirige vers des prolongations. C’était sans compter sur encore un corner. Beckham le met dans la surface, Sherringham dévie au premier poteau, Solskjær marque au second. En deux minutes, Manchester renverse complètement la situation et remporte l’une des finales les plus folles de l’histoire de la Ligue des champions. 20 ans plus tard, Solksjær gagnera un match iconique de la C1 moderne, cette fois en tant qu’entraîneur, au Parc des Princes avec un Manchester United remanié. Comme quoi, la reine des compétitions de club court dans ses veines.

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Malgré l’élimination au premier tour cette saison, Manchester United reste l’un des « grands » quand on parle de la Ligue des champions. Une victoire en 1968, une en 2008 et donc celle de 1999 font d’eux un club de haut rang et, avec cette saison 98-99, le club est rentré un peu plus dans la légende du football européen.