Football : l’importance des statistiques et des datas de nos jours
Elles sont si présentes dans notre quotidien que c’est devenu une banalité pour un suiveur assidu du ballon rond. Pourtant, les statistiques et les datas n’ont pas toujours été présentes et ces dernières révolutionnent le football moderne. Depuis la fin des années 1990, elles sont presque devenues omniprésentes dans les clubs professionnels. Au point même de voir certaines équipes se servir de ces chiffres en pagaille pour trouver le joueur parfait.
Les statistiques et datas, pour qui et pour quoi ?
Autrefois réservées aux membres d’un club, les statistiques et les datas peuvent être consultées par les néophytes du ballon rond. Elles permettent de mieux comprendre un choix tactique, d'alimenter une argumentation ou constater l’importance d’un joueur dans un 11. Scout aguerri et étudiant en analyse des performances à l’université de Derby (Angleterre), Will Frost voit dans ces nouvelles technologies une opportunité de mieux analyser : « Les statistiques et les datas ont toujours été des éléments clés dans ma manière de travailler ». Constat que partage Felipe Simonetti : « Je m’intéresse beaucoup à l’étude des statistiques et datas dans le football ». À la recherche d’un poste dans un club au Brésil, Felipe pointe néanmoins les limites de la statistique : « L’utilisation des datas sans traitement peut être très dangereuse, c’est pour cela qu’il est important de faire appel à son sens de l’interprétation ».
Dans les clubs, leurs places deviennent de plus en plus importantes. Par exemple, un club comme Manchester City compte près de 30 analystes dans ses rangs. Les scouts ont aussi vu leur métier évoluer avec toutes ses améliorations : « Les départements spécialisés rassemblent des données à ne pas négliger mais le scouting terrain reste l’élément principal quant à la phase finale du recrutement. Il faut voir cela comme un plus et non une contrainte » souligne Pad Foot, un compte Twitter spécialisé dans le scouting. Felipe rajoute : « Les données ne remplaceront pas les professionnels du métier. Le chiffre à lui seul ne parle pas beaucoup, il peut même devenir dangereux si l’analyse qui l’accompagne est trop simpliste ». Une nouvelle fois, les statistiques sont montrées comme un outil fabuleux qui peut tourner au désastre si elles ne sont pas utilisées correctement.
Une utilisation de plus en plus récurrente au fil des années
Avant les années 2000, toutes ces technologies n’existaient pas. Il fallait alors faire de longs déplacements pour observer un joueur. De plus, à cette époque, le football étranger n’était pas facile à regarder. Mais à la fin des années 1990, un homme va utiliser un programme d’analyse de données pour construire une meilleure équipe sans dépenser un budget pharamineux : Arsène Wenger. « Les clubs qui ont rejoint cette façon de penser ont connu de très bons résultats économiques avec une hausse de bénéfices, tout en ayant de meilleurs résultats sportifs sur les moyen et long termes » nous déclare alors Felipe, très studieux quand il s’agit de parler statistiques et football. Mais le pionnier de la collecte des statistiques n’est pas l’entraîneur français mais Charles Reep. Entre 1930 et 1960, il a collecté des données manuellement sur près de 500 matchs anglais.
Ainsi, depuis deux décennies, « de plus en plus de clubs ouvrent des départements spécialisés dans les statistiques aujourd’hui et ce n’est pas un hasard » pour Pad Foot. Sur le paysage audiovisuel, une révolution a également été remarquée. Diffuseur historique de la Ligue 1, Canal + a saisi ses premières statistiques peu avant les années 2000 et ne recensait que les tirs et les corners sur une feuille de papier. Aujourd’hui, des émissions sont intégralement consacrées au debrief tactique après les matchs. Fondée en 1996, l’agence Opta qui est spécialisée dans les statistiques sportives enregistre en moyenne 30 000 données sur une seule journée de championnat.
Une aide indispensable au recrutement ?
Très rapidement, les clubs ont trouvé dans ce système une opportunité d’améliorer son recrutement. « Les clubs ont compris que ce système était rentable » affirme Will, qui constate qu’il est désormais facile de trouver le bon joueur à un coût minime. Récemment passé sous pavillon américain, Toulouse profite des technologies plus avancées outre-Atlantique pour ainsi recruter mieux et pour moins cher. Branco van den Boomen raconte alors comment il est arrivé au TFC : « Toulouse a entré dans l’ordinateur le profil de joueur qu’il recherchait. Et mon nom est sorti dans la liste » confirmait le Hollandais au site Elfvoetbal quelques semaines après sa signature. Montant de la transaction : 350 000€. Autre exemple à Toulouse, Rhys Healey (25 ans) est venu de Milton Keynes Dons, un club de troisième division anglaise, pour un contrat de trois ans et un transfert estimé à 500 000€. Il en est à 10 buts cette saison.
De plus en plus de clubs donc se servent des datas pour s’alimenter et mieux vendre : « Les statistiques/datas représentent des données à ne pas négliger aujourd’hui et les clubs s’en servent notamment pour vendre ou analyser un joueur avant achat » annonce Pad Foot. « Les clubs voient l’impact des données et de l’analyse sur le recrutement et la performance des clubs » analyse Will qui se montre optimiste quant à l’avenir des scouts.
« Ces clubs sont l’avenir du football » enchérit Felipe qui va encore plus loin dans sa réflexion : « Les statistiques permettent non seulement d’analyser les dynamiques actuelles et futures, en plus de ne pas se baser sur des intuitions, qui peuvent comporter des failles et ne pas déceler toute la vérité. Une personne garde une certaine limite dans sa capacité à voir et analyser une rencontre, ce qui n’est pas le cas des datas, qui permettent donc d’avoir un meilleur angle de vue sur le match. »
Autre donnée qui montre l’évolution des datas dans le football : le fantasy football. Ils permettent aux fans de foot de former leur propre équipe et de s’affronter chaque semaine sur la base des performances réelles des joueurs. « Avant d’être scout, j’ai joué pendant des heures à Football Manager » nous témoigne Will. Comme beaucoup de passionnés, l’émergence de ces applications comme Football Manager ou Mon Petit Gazon permet de toucher un plus grand nombre de personnes : « Sans data, nous [les jeux de fantasy football] n’existerions pas » déclare Martin Jaglin, co-fondateur de MPG.
Nous avons pu le voir, de Toulouse aux scouts, les statistiques permettent au football de franchir un pas important. Si ces nouvelles technologies sont d’une aide précieuse, elles ne sont pas capables de remplacer la réflexion humaine. La perception d’un match, développée par une culture tactique abordable pour les amoureux du football, n’a jamais été aussi passionnante.