Fabuleux virtuose, magicien du dribble, éternelle légende… retour sur la vie de l’un des plus grands poètes de la sélection brésilienne qui récite au tournant des années 60 un merveilleux football dont lui seul a le secret.
Virevoltant, rapide, technique, phénoménal… les qualificatifs sont nombreux pour décrire le talent de Manoel Francisco dos Santos, dit Garrincha, mais les mots semblent insuffisants tant ses exploits furent retentissants. Aujourd’hui encore, il demeure une légende dans son pays natal, le Brésil, mais aussi dans le monde entier, et ce grâce à son football incroyable, un jeu sans pareil aux dribbles renversants qui nous laisse nostalgiques d’un temps où son duo avec Pelé faisait des miracles et transcendait les foules. Un physique atypique, petit par la taille (1.69m) mais grand par le talent, un artiste du ballon rond qui n’avait que ses pieds pour pinceaux, pour marquer de son empreinte indélébile l’histoire de son sport. Cependant, tout n’aura pas été rose dans la vie de Garrincha. Son hygiène de vie déplorable et sa forte consommation d’alcool ont été les causes principales de sa mort en 1983 et de sa fin de carrière cauchemardesque, à l’image de sa Coupe du Monde 1966 durant laquelle ses dribbles et ses crochets se heurtaient cette fois aux défenses adverses.
Sa vie et sa carrière
Né à Magé, petite commune dans la région de Rio de Janeiro, Garrincha voit le jour en octobre 1933 dans une pauvre famille amérindienne. Dès l’enfance, les recruteurs l’ignorent en raison de ses problèmes congénitaux : sa colonne vertébrale est déformée et ses jambes sont arquées. À l’issue de sa croissance, les médecins l’informent que sa jambe droite est plus longue que la gauche, et ce de 6 centimètres. Malgré ce handicap, le prodige brésilien est repéré par le club de Botafogo en 1953 et ne tarde pas à s’illustrer puisqu’il inscrit un triplé lors de sa première apparition.
Deux ans plus tard, ses performances exceptionnelles lui permettent d’être sélectionné avec les Auriverdes, avec lesquels il écrira aux côtés de Pelé l’une des plus belles pages de l’histoire de la Seleção. Il est sélectionné pour le mondial de 1958 et, après deux matches passés sur le banc de touche, il est titularisé face à l’URSS suite aux demandes de leurs coéquipiers et réalise une superbe performance, insaisissable par sa qualité de percussion et passeur décisif pour Vavá. Le Brésil écarte ensuite successivement le Pays de Galles, la France et enfin la Suède en finale, et celui que l’on surnomme « l’oiseau » figure logiquement dans le onze type de la compétition. Sa performance est tout de même légèrement éclipsée par l’éclosion d’un autre génie, Pelé, alors âgé de 17 ans.
De la gloire au désespoir
Lors du mondial suivant au Chili, Mané Garrincha inscrit 4 buts et est élu meilleur joueur du tournoi que les Auriverdes remportent à nouveau, prenant la lumière en l’absence d’un Pelé sorti sur blessure en phases de groupe. L’année 1965 voit l’ailier brésilien de 32 ans quitter Botafogo après douze saisons durant lesquelles il aura inscrit 232 buts en 581 matches, remporté de nombreux titres comme le championnat carioca et brillé par ses inspirations géniales et ses dribbles fantastiques. Il signe en 1966 aux Corinthians mais ne joue presque pas et sa Coupe du Monde de la même année est ratée et il connaît sa première défaite en sélection lors de l’élimination des siens face à la Hongrie, pour son dernier match international. Sa fin de carrière est compliquée et son dernier passage à Olera n’est pas non plus couronné de réussite. Il sombre ensuite dans l’alcool, il est atteint d’arthrose, est en surpoids, sa femme le quitte… Garrincha n’est plus que l’ombre de lui-même et s’éteint en 1983 après 4 jours durants lesquels il aura consommé des doses conséquentes d’alcool.
Son geste fétiche
Parmi les innombrables crochets, les accélérations dévastatrices ou les feintes de corps renversantes, quel était le geste favori de « Joie du peuple » (l’un de ses surnoms). Il marche systématiquement : Garrincha s’avance lentement vers son adversaire, feint de repiquer à l’intérieur puis repart brusquement vers l’extérieur avant d’accélérer et de prendre à contre-pied son vis-à-vis. Un geste technique que l’attaquant français Kylian Mbappé affectionne particulièrement et maîtrise parfaitement.
Garrincha était un génie. De par ses dribbles, son jeu proche de la Ginga et son palmarès, l’ailier droit brésilien restera une étoile scintillera à jamais dans le ciel, une étoile que l’on aurait souhaité contempler plus longtemps.
Crédits photos : Franceinfo / El Gráfico