Le 14 octobre dernier avec le Portugal, Cristiano Ronaldo inscrivait son 700ème but en carrière. L'occasion pour We Sport de dresser le portrait des cinq joueurs qui devancent encore CR7 au classement des meilleurs buteurs de l'histoire. Aujourd’hui, focus sur celui qui occupe la troisième marche du podium : Pelé.
« Désormais, nous sommes deux à être les plus grands ». C’est par cette phrase que Mohammed Ali a reconnu Pelé comme son semblable en 1977, à l’issue du dernier match de la carrière du Brésilien. Une reconnaissance due, entre autres, à ses 767 buts inscrits en carrière.
Légende d’un club…
Vous avez certainement tiqué en lisant “767 buts” juste au-dessus. Vous vous êtes même peut-être dit « n’importe quoi, tout le monde sait qu’il a marqué plus de 1 000 buts ». Il semble alors que la version servie par Pelé, qui compte ses buts marqués lors de ses nombreux matchs amicaux, ait prit le pas sur la version officielle. Car selon la Rec Sport Soccer Statistics Foundation, qui exclut les matchs non-officiels et les données non-vérifiables, le Roi n’a inscrit “que” 767 buts.
Pelé débute dans son club de (presque) toujours en 1956. Aligné avec les professionnels alors qu’il n’a pas encore 16 ans, il débloque son compteur de buts lors de son premier match avec Santos. Des débuts annonciateurs d’une suite idyllique, et fondateurs d’une domination sans partage sur le football brésilien. Avec les Poissons (surnom des joueurs de Santos), Pelé remporte six championnats du Brésil, deux Copa Libertadores et deux coupes intercontinentales. En tant que fer de lance aux avant-postes ou comme soutien de l’attaquant de pointe, il fait parler ses qualités techniques hors-normes pour planter 643 buts. Dribbleur, passeur, buteur, l’enfant de Três Coracoes sait à peu-près tout faire sur le terrain. Mais le pire pour les défenseurs adverses, c’est que son petit mètre soixante-treize est compensé par une détente verticale incroyable qui lui offre un jeu de tête fabuleux.

… et idole d’une nation
Pelé en fera d’ailleurs usage pour offrir au football brésilien les plus belles pages de son histoire. Il fait ses premiers pas avec la Seleçao en juillet 1957 et gagne sa place pour participer à la Coupe du Monde 1958, aux côtés de tauliers comme Didi ou Garrincha. En Suède, le prodige de 17 ans ne dispute pas les deux premiers matchs de groupes à cause d’une blessure. Mais la suite de la compétition le voit révéler son talent aux yeux de la planète entière et devenir le plus jeune buteur de l’histoire du Mondial. Un but en quart de finale, un triplé en demi-finale et un doublé en finale, dont un but de la tête et un enchaînement sublime : le Brésil soulève sa première Coupe du Monde, Pelé entre dans la légende.
Car si le club de Santos est aujourd’hui irrémédiablement associé au nom de Pelé, ce sont essentiellement les performances de ce dernier avec le maillot auriverde qui lui permettent d’être au cœur des débats visant à savoir qui est le meilleur joueur de l’histoire. Quatre ans après sa première couronne mondiale, le Brésil réédite la performance malgré l’absence de Pelé à l’issue du deuxième match de poule. Blessé musculairement face à la Tchécoslovaquie, la superstar de la Seleçao regarde les siens décrocher une seconde étoile depuis le banc des remplaçants.
Mais malgré ce Mondial vécu assez loin des projecteurs, la célébrité de Pelé est à la démesure de son talent. Si bien que le Brésilien commence à en souffrir au fil des années. Tandis que Santos multiplie les matchs amicaux, y compris en Europe, pour attirer le regard des foules et générer des revenus grâce à son joueur phare, les défenseurs identifient littéralement le numéro 10 comme l’homme à abattre sur le terrain, n’hésitant pas à multiplier les fautes. Alors qu’il attise les convoitises de plusieurs grands clubs du Vieux Continent, Pelé est même déclaré comme « trésor national » par la dictature militaire brésilienne et est empêché de quitter le pays. Il continue donc d’amasser les trophées et de martyriser les défenses adverses avec son club. Le compteur de buts ne cesse de grimper, bien aidé par six quintuplés et un octuplé (face à Botafogo en 1964).
Très déçu après une Coupe du Monde 1966 où le Brésil est éliminé en poules et durant laquelle il est la cible de tacles assassins, Pelé fait une pause avec la sélection. Mais il revient pour le Mondial 1970 avec l’ambition de hisser à nouveau la Seleçao sur le toit du monde, elle qui est menée par Mario Zagallo, double champion du monde aux côtés de Pelé et désormais sélectionneur.

Au Mexique, le Roi s’assoit définitivement sur son trône. Après un but lors de son entrée en matière face à la Tchécoslovaquie, Pelé ne marque pas face à l’Angleterre mais fait briller Gordon Banks, le portier britannique, qui réalise ce qui sera considéré comme “l’arrêt du siècle” et dont découlera une célèbre citation du Brésilien : « J’ai marqué un but, mais Banks l’a arrêté ». Même lorsqu’il ne trouve pas le fond des filets, le meneur de jeu parvient quand même à marquer un peu plus l’histoire.
Par la suite, les hommes en jaune se défont de la Roumanie (3-2) lors du dernier match de poules avec un doublé de Pelé, avant de battre le Pérou (4-2) en quarts de finale. Dans le dernier carré, la sélection auriverde retrouve l’Uruguay, bourreau du Brésil lors de la finale de la Coupe du Monde 1950 disputée au Maracana. Au-delà d’une demi-finale, il s’agit alors d’une vengeance pour un pays qui est encore traumatisé par cet échec. Pelé et ses coéquipiers prennent leur revanche grâce à une victoire 3-1, et rejoignent l’Italie en finale. Avec un but de la tête et une passe décisive, Pelé est l’homme clé de la victoire 4-1 qui permet au Brésil d’être sur le toit du monde pour la troisième fois. Un record qui propulse le Brésilien parmi les meilleurs footballeurs de tous les temps, si ce n’est le plus grand.
Pelé quitte ensuite la sélection brésilienne, mais continue de sévir dans la surface de réparation adverse avec Santos. Après une première retraite sportive en 1974, il revient finalement à la compétition pour éponger ses dettes et s’engage avec le New-York Cosmos. Aux Etats-Unis, Pelé emmène dans ses bagages son statut d’icône du ballon rond pour populariser le football dans tout le pays. « On le prenait en photo après l’entraînement », témoignait ainsi l’un de ses adversaires. Mais au-delà de son image, le Roi en a encore sous le pied et hisse son équipe jusqu’au Soccer Bowl et remporte la North American Soccer League. Il passe deux ans au pays de l’Oncle Sam, tout juste le temps de marquer les esprits de millions d’américains et étendre sa réputation sur un nouveau continent.

Après avoir raccroché les crampons au terme de trois décennies passées ballon au pied, Pelé voit son image de superstar continuellement cultivée. Entre un titre d’athlète du siècle remis par le CIO et un statut de meilleur joueur du XXe siècle attribué par la FIFA, le Brésilien est élu meilleur joueur de l’histoire en 1999 à la suite d’un vote par tous les lauréats du Ballon d’Or encore vivants. De quoi mieux accepter de ne pas avoir officiellement atteint les 1281 buts annoncés, et ce même s’il avait célébré le cap d’O Milesimo pendant près de vingt minutes au beau milieu d’un match de championnat. Des mythes qui persistent, c’est aussi ça qui construit l’aura d’une légende.