Les 30 moments marquants de 2019 : le Tour de France de Thibaut Pinot
Il y a 19 ans maintenant, Nelson Mandela disait « Sport has the power to change the world ! » Impossible de le contredire après ce que tous les amateurs de sport et de sensations fortes ont vécu cette année. À l’instant même où vous êtes en train de lire cette phrase, Trent Alexander-Arnold s’apprête sans doute à tirer un corner et Julian Alaphilippe a sûrement eu le temps de se glisser dans une échappée. Mais qu’importe votre sport de prédilection, la rédaction de WeSportFr a fait de la place à tous, et revient sur les 30 événements sportifs qui ont fait 2019.
Aujourd’hui retour sur le Tour de France de Thibaut Pinot en 3 dates entre bordures, giclette et déchirures.
15 Juillet : débordé de bordures
C'était idéal, donc ça faisait un peu peur. Le contre-la-montre par équipe avait été géré de telle manière que Thibaut Pinot n'avait pas perdu de temps sur ses concurrents les plus sérieux à la victoire finale ; il avait suivi Geraint Thomas et rejoint Julian Alaphilippe dans la pente finale très sélective de la Planche des Belles ; avec le Berrichon, il profite de la chute d'Ineos et d'un moment de flottement dans le peloton pour attaquer dans la côte de Jaillière, grapiller 28 secondes aux meilleurs et prouver qu'encore une fois les Français en ont sous la pédale.
Survient donc le félon jour du 15 Juillet, une étape de transition entre Saint-Flour et Albi. Une de celles qui peut aussi bien se régler entre grosses cuisses qu'entre professionnels des coups de grisou. Ce sera du reste Wout Van Aert, le prototype d'un croisement entre ces deux profils, qui s'imposera devant Elia Viviani et la meute des sprinteurs. Mais l'important n'est pas là, l'important se trouve dans un de ces innombrables ronds-points d'une de ces innombrables routes de province dont le Tour de France fait profession. Un rond-point pris à droite et qui fait parcourir à l'équipe de Thibaut Pinot quelques hectomètres supplémentaires et fatals. Avec beaucoup de métier et de vent latéral, la Deceuninck-QuickStep de Julian Alaphilippe accélère le rythme avec l'aide des gros rouleurs du peloton. Cassure, bordure, rideau. La Groupama-FDJ a beau se démener, il ne pourront rien contre la force de frappe des Ineos, Jumbo-Visma et consort. A l'arrivée à Albi, Thibaut Pinot perd 1 minute et 39 secondes sur Alaphilippe, Thomas, Bernal et toute la troupe. Le Franc-Comtois est dans une rage folle. Tous ces efforts, tout ce qui avait fonctionné jusqu'à présent pour le placer dans les conditions optimales. Surtout mesure-t-il peut-être ce qu'il lui reste d'efforts et qu'il reste de travail à son équipe pour être à la mesure des toutes meilleures du peloton, et ce malgré la progression gigantesque de ces dernières années.
20 Juillet : Le jour de gloire
Thibaut Pinot est le plus fort, il le sait, il le sent. Julian Alaphilippe ne tiendra pas la longueur, Geraint Thomas n'est pas le même homme depuis sa chute dans le Tour de Suisse. Qu'en est-il d'Egan Bernal ? Le Colombien semble encore trop tendre et en fait la démonstration dans le contre-la-montre de Pau. Thibaut Pinot, pourtant le moins armé des grands favoris, résiste quant à lui mieux que bien aux cadors de la discipline Thomas et Alaphilippe qui trustent les deux premières places. Il perd 49 secondes sur le Français, une trentaine sur le Britannique, le Colombien ne figure pas dans le top 10.
Mais c'est le lendemain que Thibaut Pinot va confirmer son statut de favori le plus en forme et le mieux à même d'être en jaune à Paris. Mais Thibaut Pinot n'est pas un homme comme les autres, encore moins un coureur comme les autres, alors il ne peut pas faire les choses comme les autres. C'est dans l'une des étapes les plus prestigieuses de ce Tour de France 2019, au sommet de l'un des cols les plus prestigieux de l'histoire du Tour qu'il va s'imposer.
En haut du Tourmalet, il est le seul à lever les bras. Grâce au train imprimé par un très grand David Gaudu, il parvient à décramponner Bardet, Uran et Porte, plus tard Thomas. Parmi le groupe aux avants-postes, il est le seul encore capable d'attaquer et finalement de s'imposer seul grâce à une giclette intacte malgré les heures d'efforts. Il met 6 secondes à Alaphilippe et Kruijswijk, 8 à Bernal et Buchmann. Surtout, il s'impose comme le meilleur grimpeur du peloton, par conséquent le grandissime favori de ce Tour, promis à un montagnard.
26 Juillet : la blessure, la vraie
L'image est encore nette, la blessure encore vive. Moins vive que celle qui a tailladé la cuisse, les méninges et le cœur de Thibaut Pinot, mais à n'en pas douter, elle continuera de se réveiller, certaines après-midis de juillet, aux passionnés de biclou qui voyaient déjà le Français lever les bras en haut de l'Iseran, prendre le maillot jaune à son compatriote et rompre un charme vieux de 1985.
Ça a débuté comme ça. Thibaut, il avait rien demandé. Rien. C'est le guidon qui lui est rentré dans la cuisse, à Gap, à la fin d'une étape qui frottait. Une blessure qu'on n'attrape jamais sur un vélo. La déchirure musculaire, c'est l'anti-blessure du cycliste. Celle pourtant qui va mette fin à tous les espoirs de sacre.
Dans les trente premiers kilomètres d'une étape qui sera finalement raccourcie au sommet de l'Iseran, Thibaut Pinot consulte la voiture médicale qui commence par bomber la zone douloureuse et à enlever puis remettre le strap qui bande sa cuisse. On commence à s'inquiéter, puis on le voit distancé et on a compris. Thibaut Pinot pleure, Thibaut Pinot s'arrête de pédaler. Thibaut Pinot descend de son vélo, Thibaut Pinot est effondré. Thibaut Pinot abandonne le Tour de France, la France du Tour pleure Thibaut Pinot.
Son Tour de France. Celui pour lequel il s'était préparé toute la saison. Celui qui était taillé pour ses qualités exceptionnelles de grimpeur, sans que des chronos viennent tout fiche en l'air. Il était le plus fort, ça ne lui était jamais arrivé jusqu'à présent parmi une telle start-list. Thibaut Pinot reviendra plus fort, parce qu'il est ce qu'il est : un coureur exceptionnel.
Demain, retour sur la demi-finale à suspense de la dernière C1 : Ajax-Tottenham !