Le journal économique Forbes vient de publier un article, où ils posent les bases d'un possible retrait de Renault de la F1 au sortir des accords Concorde actuels, fin 2020. Explications.
La Formule 1 est à la croisée des chemins. En ce moment, Liberty Media, la FIA et les équipes parlent et négocient sur ce que doit être le futur de la discipline reine du sport automobile. Tant sur le plan économique, que technique et réglementaire. Mais depuis plusieurs mois, un jeu politique s'est installé. Un jeu où tous les acteurs veulent peser et faire valoir son point de vu pour l'avenir.
Pour autant, selon divers médias, une seule équipe se serait engagée sur le long terme dans la discipline : Renault. Mais Christian Sylt annonce, documents à l'appui, que l'équipe française pourrait se désengager à la fin de la saison 2020. Soit au terme des accords Concorde actuels.
Crédits image: F1.com
Un problème économique pour Renault
En 2015, Renault annonce son retour en tant que constructeur de F1. Pour ce faire, ils ont acquis, pour la modique somme d'une Livre Sterling symbolique, les ruines de Genii Capital. Mais cette partie n'était que la face visible de l'iceberg. Et le retour de Renault cache d'autres choses. En effet, en 2015 Bernie Ecclestone essayait de vendre les droits de la F1 (détenus alors par la société d'investissement CVC). Et pour faire réussir cette vente, Ecclestone avait besoin de l'appui d'un grand nom de l'automobile. Cela tombait bien, puisque Renault avait la volonté de revenir au sein de la discipline. Mais pas à n'importe quel prix !
C'est ainsi que Ecclestone accorda des “passe-droits” économiques pour convaincre la marque au losange de revenir. Un bonus de 22M$ si et seulement si Renault gagne deux titres de champion du monde et 22 victoires. Et à l'heure actuelle, ce n'est plus possible de toucher ce bonus avant la fin des accords Concordes actuels. Or il est quasi certain que ce bonus accordé ne sera plus d'actualité avec les accords de 2021. Puisque Liberty Media voudrait plus d'égalité entre les équipes.
Crédits image: MSsport.fr
Autre problème économique le coût d'une F1 aujourd'hui. Renault n'est pas seulement constructeur, c'est aussi un motoriste. Et le passage à l'ère hybride ne s'est pas fait sans de gros investissements de la part des motoristes. Depuis 2014, chaque motoriste a déjà déboursé près d'un milliard de dollars pour le développent des moteurs ! Et bien que cela ne soit pas encore écrit ou défini, il est possible de voir la motorisation des F1 évoluer pour 2021. Ce qui veut dire aussi plus de dépenses. En 2017 le coût du développement de la RS17 s'élevait à 342M$, pour l'équipe et pour les moteurs ! C'est une dépense considérable pour Renault.
Un manque de performance criant
Pour son retour en F1 en 2016, Cyril Abitboul, directeur sportif de Renault F1, avait tablé sur un plan de marche progressif, mais très précis. Jouer les points en 2016. Un podium et la 4e place au championnat pour 2018. Et se battre pour une victoire, voir le championnat d'ici 2020. De même, le recrutement des pilotes s'est fait dans ce sens. Hülkenberg en 2017, Ricciardo en 2019, Ocon pour 2020. Alors certes Renault a progressé : de 9e en 2016, elle a obtenu cette 4e place en 2018.
Crédits image: AutoHebdo.fr
Mais pas de podiums. Et la voiture est loin de se battre pour la victoire chaque année. Même du côté moteur c'est pas reluisant. Alors certes, il gagne, mais c'est avec Red Bull à chaque fois. Et la fiabilité du bloc Renault tout comme les performances comparées au Ferrari et Mercedes est très en deçà. Beaucoup de casses, manque de puissance du bloc. C'est à cause de ça que Red Bull a quitté Renault (en plus du fait qu'ils souhaitaient être l'écurie première de la marque). Et tout ceci peut encourager Renault à plier bagage.
Renault peut-il vraiment quitter la F1?
Théoriquement, oui. Il y a une conjoncture qui pourrait amener Renault a stopper son engagement en F1, tant économique que sportive. D'un côté, le coût de plus en plus cher de la F1 et la possible perte d'avantages donnés sous Ecclestone peut amener Renault à se poser des questions sur son avenir. De même, la conjecture du groupe Renault-Nissan (et l'affaire Ghosn) peut les forcer à se concentrer sur d'autres domaines. Et les performances en deçà de ce qui était attendu n'arrangent pas le constat.
D'un autre côté, la F1 reste une vitrine. Un moyen de rester visible aux yeux du monde. Une vitrine technologique formidable. Et la technologie hybride de la F1 (et du sport auto en général) est une technologie (complexe) mais ré-utilisable pour la voiture de Monsieur tout le monde. Et Renault a investi énormément en F1. Sur les pilotes, dans le board (notamment l'arrivée de Marcin Budkowski en 2018), mais aussi sur les site de Enstone et de Viry-Chatillion.
Notre point de vue
De notre point de vue, il n'y a aucune raison pour Renault de quitter maintenant la F1. Avec l'arrivée des accords Concorde 2021, du nouveau règlement sportif et technique, ce serait une erreur. Pour autant, si on prend tous les indicateurs que nous propose Christian Sylt, la porte à un départ est ouverte. Et malgré ce que dit Autosport ou la BBC, comme quoi Renault a signé un contrat avec prolongeant son aventure en F1 jusqu'en 2024.
Et même si l'écurie a fait signer un contrat longue durée à Esteban Ocon (deux ans plus une en option), il est bon de rappeler que Renault reste avant tout un sponsor (à l'image de ce que peut être Ineos au cyclisme). L’écurie de F1, qui est basée à Enstone n'appartient pas complètement à Renault. Et de ce fait, ce serait une chose facile que de se retirer.
Crédits image: Eurosport.fr
Il n'y a aucune raison que Renault ne s'engage pas dans la durée en F1. Et si menace il y a, c'est une manœuvre politique, qui a pour but de peser dans les négociations des accords Concorde. Pour autant, il y a une possibilité, une ouverture. Elle est en 2020, à la fin du contrat qui lie Renault la Liberty Media (via ces accords Concorde). Et comme le dit Sylt : “Rien ne laisse présager que Renault, ou toute autre équipe, quittera la F1 à la fin de l’année prochaine, mais de même, rien ne semble pouvoir garantir qu’elle reste“.