Max Verstappen l'a fait. Alors qu'on le pensait battu par Lewis Hamilton sur le circuit d'Abu Dhabi, un accident de Nicholas Latifi suivi d'une Safety Car a tout fait basculer. Retour sur les trois moments-clés de cette ultime course qui ont permis au pilote Red Bull d'aller au bout de son rêve.
Intense. C'est probablement le mot qui colle le mieux à cette saison 2021 de Formule 1. À égalité avant la 22ème et dernière course de la saison à Abu Dhabi (369,5 points partout), Max Verstappen et Lewis Hamilton allaient se disputer le titre de champion du monde ce dimanche. En pole à l'issue des qualifications, le Néerlandais pouvait légitimement croire en ses chances, bien que le Britannique soit sur une meilleure dynamique après s'être emparé des trois derniers Grands Prix.
Le début de course a cependant tourné au cauchemar pour le pilote Red Bull de 24 ans. Temps de réaction moyen, perte de sa première place dès les premiers mètres, Verstappen s'est vu griller la politesse par un Lewis Hamilton offensif et déterminé à prendre la course en main. Touché par son rival dès le virage n°6, le Britannique n'a pas fait l'effort de rester en piste et a coupé la route, gagnant (déjà) de précieuses secondes sur son vis à vis. Malgré les plaintes du clan Red Bull, les commissaires n'ont pas ouvert d'enquête, jugeant que Lewis Hamilton avait subi la manœuvre du fantasque néerlandais. Le premier épisode d'une après-midi d'anthologie.
Sergio Pérez, coéquipier modèle
À la sortie des dix premiers tours de course, Max Verstappen accusait déjà un retard conséquent sur son adversaire. En déficit de rythme par rapport à la Mercedes, son équipe s'est sentie dans l'obligation de le rappeler très tôt au stand, dès le 14ème tour. Un choix qui a permis à Sergio Pérez de prendre la deuxième puis la première place du Grand Prix quelques minutes plus tard, au moment où Hamilton s'est lui aussi arrêté pour un changement de pneumatiques.
Trois solutions s'offraient alors à Verstappen pour revenir dans les clous d'Hamilton, outre un pilotage parfait de sa part : une défaillance du Britannique, un incident de course provoquant un drapeau rouge ou une voiture de sécurité et/ou un Sergio Pérez capable de ralentir le pilote Mercedes le temps que son coéquipier grapille ses quelques secondes de retard.
La dernière des trois a été la première à se produire. Ressorti derrière Pérez après son arrêt au stand, Hamilton a fondu sur le Mexicain jusqu'à le doubler dans la zone de DRS au 20ème tour. Mais alors qu'on pensait le Britannique sorti d'affaires, “Checo” n'a pas dit son dernier mot et a repris l'avantage à l'intérieur. Une véritable bataille s'est alors engagée entre les deux hommes, sur plusieurs kilomètres. Après avoir profité de la ligne droite suivante pour reprendre l'avantage grâce à la vitesse de sa monoplace, Hamilton a une deuxième fois été pris par le Mexicain dans les virages.
Le n°2 de Red Bull a finalement résisté pendant plus d'un tour, ralentissant considérablement Hamilton et permettant à Verstappen de se rapprocher de près de sept secondes. “C'était crucial à ce moment de la course parce que je savais que Lewis avait la course sous contrôle. Il était donc urgent [de le ralentir] mais j'avais des pneus très usés. Ça a bien marché, au final je suis heureux d'avoir aidé Max et l'équipe“, s'est exprimé Sergio Pérez après la course. De 8,5 secondes de retard, Verstappen a profité du travail de son coéquipier pour ne revenir qu'à 1,2 seconde du Britannique. Bien que la physionomie du reste de la course ait un peu atténué l'impact de ce chassé-croisé, impossible de ne pas faire mention de la formidable abnégation du Mexicain.
Nicholas Latifi, facteur X de la fin de course
Tour 53. Il restait cinq tours de course au moment au Nicholas Latifi a terminé dans le mur du circuit de Yas Marina, après un duel mal négocié avec Mick Schumacher au virage 14. Toujours en grande difficulté face au rythme imposé par la Mercedes d'Hamilton, Verstappen pointait alors à plus de 12 secondes du leader. Mais Red Bull et son pilote ont une nouvelle fois repris espoir lorsque la direction de course a annoncé l'entrée en piste de la voiture de sécurité.
“Ce n'est pas comme cela que j'espérais finir la course. Je n'ai pas réalisé sur le moment que cela aurait une incidence. Je ne savais pas ce que je faisais et ce n'était évidemment pas mon intention de perturber le championnat. C'était juste une erreur” déclarera Latifi après la course. D'habitude assez discret les dimanches de Grand Prix, Nicholas Latifi aura cette fois-ci fait parler de lui, pour le plus grand bonheur de Max Verstappen et au grand désarroi de son rival.
Si la question de stopper la course s'est longtemps posée, ce qui aurait permis à Hamilton de chauffer de nouvelles pneumatiques, le directeur de course Michael Masi était convaincu que les débats puissent reprendre avant la fin des 58 tours, même sans brandir de drapeau rouge. Inquiet, le Britannique a alors demandé à la radio à ce que la voiture de sécurité aille plus vite. Après un imbroglio de plusieurs tours, notamment au sujet des voitures retardataires, Masi a finalement autorisé ces dernières à dédoubler et ordonné la reprise de la course, au 57ème tour.
Deux derniers tours pour l'histoire
Avant cet épisode de la Safety Car, Max Verstappen avait pu changer ses pneus, tandis qu'Hamilton avait préféré rester en piste pour ne pas céder de temps à son adversaire. Alors qu'il s'était aligné sur le choix de Verstappen en début de course pour pallier un risque similaire, le Britannique n'a cette fois-ci ni eu le nez fin, ni eu la réussite pour lui.
Avec ses gommes dures usées, il a été trop difficile pour Hamilton de résister à un Verstappen porté par l'enjeu, qui plus est avec de nouveaux pneus (tendres). Ce qui devait arriver arriva au début du 58ème tour : le Néerlandais a pris la tête au virage n°5.
Pris par un mouvement intérieur comme ce fût souvent le cas ce dimanche, Hamilton l'a compris. Max Verstappen a l'aspiration pour lui et ne lâchera plus sa dixième victoire de la saison. Peut-être la plus belle. Peut-être la plus anecdotique aussi, tant n'importe laquelle des places lui aurait surement été du moment que Lewis Hamilton ne terminait pas devant lui. Christian Honer et toute l'écurie autrichienne peuvent exulter : voici leur pilote champion du monde de Formule 1.
Outre un premier sacre pour Red Bull depuis le quatrième de Vettel en 2013, Max Verstappen ramène à son écurie son premier titre de champion du monde des pilotes depuis le début de l'ère hybride, jusque-là archi-dominée par Mercedes. Les multiples réclamations de ces derniers post-Grand Prix n'y changeront rien, Red Bull sort vainqueur d'un duel haletant qui aura tenu en haleine les amateurs de Formule 1 tout au long de l'année, jusqu'aux derniers mètres de course.