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J6 – Brésil 2009 : Button et Brawn au sommet à tout jamais

Pendant 30 jours, la rédaction F1 va vous proposer une rétrospective sur un Grand Prix particulier. Que ce soit un GP des années 70 ou tout récent, toutes les générations vont y passer, avec un prisme différent à chaque fois. Des joies, des larmes, des tragédies, des intempéries … de nombreux événements ont marqué le monde de la F1 jusque là. Aujourd'hui, pour le sixième jour, retour sur une course spéciale pour l'écurie Brawn Gp et son pilote Jenson Button. Le Grand Prix du Brésil 2009 qui les a sacrés champion du monde.

Contexte Pré-GP

En arrivant à Interlagos, pour le Grand Prix du Brésil au milieu du mois d’octobre 2009, le paddock de la Formule 1 attend son champion du monde. Si le classement constructeur est presque figé, il manque 1 point à Brawn GP pour devenir champion du monde constructeur ; le classement pilote est encore ouvert.

Sur la liste des prétendants se trouve 3 pilotes jamais titrés. Le jeune Sebastian Vettel avec sa Red Bull Renault vient de remporter le GP de Suzuka au Japon quelques semaines plus tôt. Il a profité des résultats médiocres des pilotes de Brawn GP pour se rapprocher au classement. Rubens Barrichello qui compte 71 points à l’ouverture de son Grand Prix national voit la menace Vettel dans ses rétroviseurs avec ses 69 points. Pour le pilote britannique, Jenson Button, il peut être couronné dès ce week-end, avec ses 85 points, il suffit que le britannique finisse à moins de 4 points de son coéquipier pour s’adjuger le titre.

Ce fut un week-end éprouvant mentalement pour le pilote britannique. Sur les terres de son coéquipier, il a du vivre au rythme des huées, sifflées et insultes. Dans son autobiographie, il raconte qu’en sortant d’un restaurant une chaine de télé avait placé un escabeau sous la sortie afin que Button passe dessous, symbole de malchance. Ce genre de petits détails peut affecter un pilote lorsqu’il court pour le titre. Mais, Button sait que la décision se fera sur la piste et non en dehors.

Un Vendredi contrasté pour Brawn GP 

2 garages, 2 ambiances. Voilà comment peut s’analyser la journée de l’équipe britannique. Les deux séances d’essais ont redistribué les cartes. Le vendredi matin, Marc Webber a signé le meilleur temps en 1 :12.463. Pourtant, les regards sont tournés vers les 2 voitures de Brawn Gp et celle de Vettel. Pour Rubens Barrichello, tout est au beau fixe. Le brésilien a réalisé le deuxième meilleur temps à 0.411 millième de Webber. Il devance aussi Sebastian Vettel de 0.058 millièmes et montre qu’il a un petit coup d’avance sur le prodige allemand.

En revanche, les doutes de Jenson Button et les résultats en demi-teinte qu’il obtient depuis quelques temps ne rassurent pas le britannique qui envisage de moins en moins d’être titré dès ce Grand Prix. Septième le matin et relégué à 3 dixièmes de ses rivaux, Button a de quoi se rassurer l’après-midi. Il ne se classe que cinquième mais n’est qu’à 5 centièmes de son coéquipier. Par ailleurs, il a réussi à battre son autre rival mais pour seulement 88 millièmes.

Au soir de ces essais libres, Barrichello semble plus que jamais en position de priver Button de titre. Poussé par la ferveur de ses supporters, encouragé par ses bonnes performances et sur un tracé qu’il connait bien, le brésilien peut rêver de faire basculer le classement des pilotes.

Des conditions dantesques pour une qualification historique  

Il y a des jours dans une saison de Formule 1 où toutes les conditions sont réunies pour faire triompher un pilote. Ce samedi 17 octobre 2009, Rubens Barrichello en a vécu un.

Sur le circuit d’Interlagos, une pluie diluviale s’abat toute la journée. La séance d’essais libre numéro 3 ne dure que 17 minutes. Les raisons : 45 minutes annulées pour cause de piste impraticable. Lorsque les pilotes s’élancent, il faut un quart d’heure à Romain Grosjean pour mettre fin à la séance. Victime d’aquaplaning, il a fortement touché le mur mais heureusement sans gravité. Un accident qui a contraint les commissaires à clore la séance pour ne pas faire prendre trop de risques aux pilotes.

Mais sur cette séance, c’est Jenson Button qui est à la fête. Troisième derrière les 2 Williams, il devance très nettement ses 2 rivaux alors 14ème et 15ème. Comme si la météo pouvait sauver un week-end compliqué pour le britannique. Une lueur d’espoir qui va vite s’éteindre en qualification.

L’après-midi, la piste d’Interlagos est transformée en véritable piscine. Le déluge, qui a mis fin prématurément à la séance du matin, redouble d’importance. La qualification a dû être arrêtée plusieurs fois en raison d’accrochages ou des décisions des commissaires qui jugeaient la piste impraticable. Elle rentre dans l’histoire de la plus longue qualification car elle a duré 2 heures et 41 minutes. Mais une telle pluie est profitable au spectacle. Les cartes ont été complètement redistribuées et ce dès la Q1. Après le drapeau rouge occasionné par la sortie de piste de Fisichella, Vettel se retrouve piégé avec de mauvais réglages et ne se qualifie que 16ème.

Une aubaine pour Jenson Button qui voit un de ses rivaux partir loin sur la grille le lendemain. Mais en Q2, rien ne se passe comme prévu. Vitantonio Liuzzi est victime d’un gros accident contre le mur des stands et provoque un nouveau drapeau rouge.

Liuzzi et sa Force India directement victimes des conditions dantesques de la piste brésilienne. Crédit photo: BBC

Au restart, tous les chronos chutent mais Jenson Button est incapable d’accélérer à cause d’un mauvais choix de pneumatiques, il termine quatorzième et s’élancera juste devant Vettel. L’allemand a progressé d’une place après que Liuzzi ait changé de boite de vitesse et donc pris 5 places de pénalités.

Rubens Barrichello bien parti pour relancer le championnat. Crédit photo: Ouest france.

Vient alors le temps de la Q3. Le mauvais week-end de Button continue dès lors que son plus grand rival pour le titre, son coéquipier Barrichello signe la pole position devant des fans en délire. Le natif du pays est le seul des cadors à s’être sorti du piège brésilien et à avoir une place privilégiée dans la course au titre. Mais les points ne se gagnent que le dimanche.

Un sacre venu d’ailleurs

Même si un week-end est catastrophique, la décision ne se fait que le jour de la course. C’est avec cette motivation qu’arrive Jenson Button sur le circuit du Brésil. La pluie a cédé sa place à un temps nuageux qui est plus favorable à Button. Si la situation en restait là, Barrichello serait revenu à 2 points de Button et tout se jouerait à Abou Dabi. Mais dans le premier tour de course, Jenson Button peut compter sur un don du ciel pour le replacer dans la course, de façon à envisager un titre au terme de ce week-end brésilien.

Partant de la quatorzième place, Button gagne immédiatement une position sur Romain Grosjean qui réalise un mauvais départ. Dans ce premier tour chaotique, Kovalainen se retrouve en travers de la piste et touche Fisichella et Vettel. L’allemand perd du temps mais peut repartir. Dans la ligne droite qui suit les S de Senna, Webber emmène sur l’herbe Räikkönen, le contact ôte un morceau de l’aileron avant de la Ferrari qui doit s’arrêter au stand.

Juste derrière ces 2 pilotes, Jarno Trulli tente de dépasser Sutil qui ne le voit pas. Trulli perd le contrôle de sa monoplace dans l’herbe et entre en collision avec Sutil qui traverse la piste et entraîne le pauvre Alonso dans son accrochage. Les 3 pilotes doivent abandonner et Trulli et Sutil s’expliquent verbalement sur le bord de la piste. La voiture de sécurité entre en piste.

Pendant ce temps-là, Kovalainen et Räikkönen rentrent au stand. Quand la McLaren ressort, les mécaniciens n’ont pas eu le temps d’enlever le tuyau de carburant encore attaché à la voiture. Le pilote Ferrari qui arrive derrière voit ses gaz d’échappements enflammer le carburant causant un départ de feu rapidement maitrisé dans la ligne des stands.

Malgré cet incident, les 2 pilotes ont pu reprendre leur place dans la course. Crédit photo: auto plus

Après ce premier tour, Button se retrouve neuvième à une place en dehors des points. Une aubaine pour le pilote britannique. Les tours d’après, il réagit comme un champion. Il dépasse autoritairement Nakajima et Buemi. Mais Button doit faire face à Kobayashi qu’il n’arrive pas à doubler.

Au 22ème tour, Heidfeld alors 3ème s’arrête mais son ravitailleur ne fonctionne pas et doit abandonner dans son tour de sortie. Au 27ème tour, Rosberg doit lui aussi abandonner, ce qui offre une nouvelle place à Button.

Quand il rentre au stand au 29ème tour, il ressort 6ème. Barrichello n’est lui que 3ème et le pilote britannique est virtuellement champion du monde. Un tour plus tard, Vettel, 2ème ne s’est pas encore arrêté et doit passer par les stands. Il ressort juste derrière Button en 7ème position.

Dans la seconde vague de ravitaillement. Après les arrêts de Hamilton, Kubica et Räikkönen, Vettel et Button se battent pour la 4ème place. Webber mène une course tranquille, mais ce n’est pas le cas du pilote britannique de Brawn GP. Au 54ème tour, il effectue son 2ème arrêt et ressort 6ème mais bloqué entre Kovalainen et Kobayashi. 5 tours plus tard Kovalainen rentre au stand et Button respire un peu plus en étant 5ème.

Le bonheur est tout près pour Jenson Button, à 8 tours de la fin. Barrichello et Hamilton se touchent lors d’une passe d’armes et le brésilien doit rentrer au stand et abandonner sa 3ème place. Webber gagne la course devant Hamilton et l’étonnant Kubica. Mais tous les regards sont tournés vers la voiture blanche et verte qui passe la ligne en 5ème position. Celle de Jenson Button qui remporte son premier titre de champion du monde et offre par la même occasion le titre constructeur à Brawn GP.

Une course heureuse pour le britannique après un début de week-end très difficile. A la radio, Button entonne la chanson de Queen « We are the Champions » et crie à en  perdre la voix. Il réalise son rêve, il est champion du monde !

Un tour de décélération inoubliable pour Jenson Button. Crédit photo: F1.fr

Déclaration d’après GP

Jenson Button a d’abord reçu les félicitations de son coéquipier, symbole d’une relation toujours aussi amicale malgré ce contexte un peu tendu. Il retrouve ses mécaniciens et son équipe dans le parce fermé. Tous pris d’une euphorie qui mettra quelques jours à redescendre.

Jenson Button sortant de sa voiture qui prend la pose devant les photographes autour de lui. Crédit photo: Auto Plus.

Dans la zone mixte, les émotions divergent. D’un côté toute la joie du pilote britannique et de son équipe. Button déclare : « Je suis le champion du monde. Et je vous préviens que je ne vais pas m'arrêter de le dire jusqu'à ce que je prenne mon vol ce soir ».

Tout comme celle de Ross Brawn, propriétaire de l’écurie : « Je suis incroyablement fier de l'équipe et de nos pilotes. C’est tellement spécial d'avoir gagné le titre des pilotes et des constructeurs lors de notre première année ».

Mais il y a aussi Sebastian Vettel fair-play mais en larmes d’avoir perdu le titre en ce jour,  : « Je pense qu'il y a un gars chez Brawn plus heureux que moi aujourd'hui. Tout compte fait, c'était une bonne course. Nous avons été aidés par les accidents mais 4ème était le maximum accessible. Sans le problème d'hier en qualification, nous aurions pu gagner. Il n'y avait pas une grosse pression pendant la course. Je savais que Jenson était juste devant ou juste derrière moi et qu'il était en position de marquer des points pour le championnat. A un moment, j'ai prié pour qu'il pleuve. Il y a eu un petit parfum de pluie mais rien de plus. Bravo à Jenson et à Brawn. Ils ont fait le meilleur travail cette année ».

L’écurie Brawn GP et ses pilotes ont bien sûr réalisé la traditionnelle photo de champions avant de faire une fête bien méritée.

Le titre célébré dans les stands d’Interlagos. Crédit photo: l'auto-journal.

 

Un week-end d'octobre incroyable pour toute l'équipe Brawn GP et son pilote britannique Jenson Button. Un Grand Prix à rebondissements pour couronner une équipe qui n'aura vécu qu'un 1 an dans le monde la Formule 1. Racheté par Mercedes pour devenir Mercedes GP en 2010, l'écurie de Ross Brawn aura marqué de son empreinte l'histoire de la F1. Une seule et unique couronne pour Button qui ne gagnera pas d'autres titres avant sa fin de carrière en 2016.

Journaliste spécialisé en sports mécaniques.

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