Pour cette onzième journée de L1 nous vous avons demandé de choisir votre Grande Rougadore du week-end. Vous aviez donc le choix entre la doublette Laborde/Delort, duo magnifique dans une équipe surprenante et troisième avec 22 points, Gabriel Boschilia, le milieu brésilien de Nantes mais meilleur monégasque de la saison pour le moment, Rémi Oudin, Rémois, pour l’exploit d’avoir planté un doublé dans une attaque qui ne mettait plus un pied devant l’autre et Kylian M’Bappé, pour son entrée tonitruante dans le choc Marseille-Paris. Nul besoin de préciser qui a gagné, on embraye direct.
Comme vous êtes prévisibles… Presque autant que Kylian M’Bappé. Sa présence dans ce sondage faussait immédiatement la donne, c’était acquis vous l’avez confirmé. En même temps, nous était-il possible de ne pas le nommer? Non, bien sûr. Le choisir est-il un scandale? Oh que non!
Prévisible car qui n'a pas pensé au moment de le voir entrer: “et s'il marquait? et s'il décantait la rencontre?” Comme face à l'Islande, la lumière est venu du Sauveur, sauveur des bleus la première fois, et du PSG la suivante.
On connaissait le M’Bappé quadruple buteur en 19 minutes (face à l'OL, 5-0 score final, ce qui lui valut d'être le tout premier GR), on connait maintenant le M’Bappé prestidigitateur. “Mesdames et messieurs, vous avez devant vous un match tout à fait banal, tout à fait ordinaire, vous le constatez depuis une heure maintenant. Attention, et hop, abracadabra, j’accélère un coup et voilà le PSG devant au score, les Marseillais au fond du seau et le choc est sauvé.” À moins que ce ne soit le magicien Tuchel, qui ait sorti un lapin de son chapeau et fait basculer le match, mais nous allons y revenir.
Pauvre Boubacar Kamara, depuis plusieurs matchs, le jeune défenseur central de 18 ans s’évertuait à prouver à son entraîneur et à ses supporters que la comparaison avec les plus grands n’étaient pas aussi absurde qu’on pourrait le croire. Les fans marseillais en venaient même à se dire qu’il était sûrement celui qu’il fallait dans la défense centrale de l’OM, en chantier depuis le début de saison. En une accélération de l'ailier Parisien, l'international U19 a subitement vieilli de vingt ans en plus. De la fougue de la jeunesse, il est passé à la charrette de Pat Evra. À la 65e minute, M’Bappé accélère, dépose Kamara et s’en va battre Mandanda. Cruel pour l’OM, cruel pour son défenseur central, mais révélateur du talent du Parisien: même mauvais, même sorti du banc, c’est lui qui te fera basculer une rencontre. Une pointe de vitesse sur 35 mètres et adieu les espoirs Marseillais, amis journalistes, vous pouvez changer toutes vos analyses du match. En un éclair, la partie était pliée. On peut parler du but refusé, du penalty non accordé, tout ce que Rudi Garcia veut évoquer: le score a basculé, Marseille ne s’en est pas remis et Paris a gagné. Et c'est la marque des très grands. Surtout quand ça devient une habitude.
L’ailier droit Parisien va ensuite gratifier le Vélodrome de 2-3 jolis gestes: un extérieur du pied parfait pour servir Neymar, puis une seconde accélération encore sur le pauvre Kamara, cette fois bien stoppée par Mandanda, peut-être un peu chanceux, avant une dernière passe dans le trou pour Neymar en toute fin de match, ce qui amènera le but de Julian Draxler.
Le magicien Bappé et son assistante Tuchel…ou le contraire
Le PSG doit-il sa victoire à son jeune attaquant? Peut-être, qui sait? Toujours est-il que Choupo-Motting avait paru emprunté avant sa sortie au profit du jeune français, et ne semblait donc pas en mesure de faire basculer la rencontre. Le club parisien était alors inefficace offensivement. Difficile donc de ne pas penser que le club doit, au moins en partie, les trois points à son génie.
En partie car il serait réducteur de ne pas parler du coaching de Tuchel. Les observateurs appelaient le coach allemand à des choix forts après les dernières prestations de certains de ses cadres, notamment mercredi face au Napoli.
Trop câlin et pas assez sévère l’Allemand? Bah tiens! M’Bappé et Rabiot sur le banc. Qui c’est le Bisounours maintenant? Le coach a reconnu une décision disciplinaire en conférence de presse après la rencontre, on parle d’un retard de M’Bappé à la causerie d’avant-match. Nul doute que cette mise au ban(c) n’a pas plu à la star parisienne. Mais c'est aussi comme cela qu’on apprend, a dû se dire son coach. Et autant, il aurait été facile de lui tomber dessus en cas de mauvais résultat de son groupe (“Tuchel est-il trop sévère?” “Fallait-il sanctionner M’Bappé?” “Pourquoi M’Bappé et pas Neymar?”), autant il serait absurde de ne pas lui reconnaître le mérite d’avoir bien fait son boulot. Mettre M’Bappé sur le banc pour un choc important, c’est du coaching, le faire rentrer et le voir marquer et faire gagner son équipe, c'est du bon coaching. Alors qui c’est le magicien maintenant?
Kylian M’Bappé 2 devient donc notre troisième Grande Rougadore de la saison…après en avoir également été le premier. Et il est très probable que ce ne soit pas la dernière fois que vous le retrouviez dans cette rubrique. Reste à lui souhaiter de faire au moins aussi bien en Ligue des champions à présent. Lui qui semble atteint d’un petit syndrome PSG pour le moment (fort avec les faibles mais faible avec les forts) va devoir montrer qu’il est réellement décisif. Paris a besoin de points en C1, M’Bappé a besoin de but pour sa confiance, sa progression et éventuellement le Ballon d’or. Ça serait pas mal si les deux projets pouvaient coller.