19e de Ligue 1, Troyes n’a plus gagné la moindre rencontre depuis 9 journées et s’enlise dangereusement dans la zone rouge. Nommé en novembre dernier, l’entraîneur Patrick Kisnorbo peine à convaincre ce qui pose question sur le projet du City Football Group dans l’Aube.
Ce n’est pas demain la veille que le champagne sera ouvert à Troyes. Avant-dernier de Ligue 1, l'ESTAC vient d’enchaîner un 9ème match consécutif sans victoire en championnat sur sa pelouse face à Monaco (2-2), le week-end dernier. Avant cela, les Troyens s'étaient incliné à Ajaccio. Une nouvelle défaite contre un concurrent direct qui laisse présager de plus en plus le scénario fatidique d’une descente en Ligue 2 pour l’ESTAC. Propriétaire du club depuis le 3 septembre 2020, le City Football Group à travers ses choix est aujourd’hui dans le viseur des supporters troyens.
Le pari risqué de Patrick Kisnorbo
L’origine de la fronde, la nomination de Patrick Kisnorbo sur le banc des Bleu et Blanc. Avant lui, c’est Bruno Irles qui tenait la barre du navire aubois. Plutôt avec succès. 13e de Ligue 1 avec 12 points pris en 14 journées, la direction du club décide pourtant de se séparer de l’entraîneur qui lui avait permis de se maintenir dans l’élite l’année passée, une première depuis la saison 2005-2006. Deux griefs lui étaient reprochés : sa philosophie de jeu jugée frileuse par les supporters et son management considéré comme trop autoritaire auprès de son groupe.

Après plusieurs semaines de tergiversations et de rumeurs (Dumont, Garde et Wilcox), c’est finalement Patrick Kisnorbo qui est choisi le 23 novembre dernier. Un choix qui n’est pas réellement surprenant car l’Australien occupait le poste d’entraîneur à Melbourne City (autre entité possédé par le City Football Group). D’abord adjoint d’Erick Mombaerts (actuel directeur technique de l’ESTAC), l’Australien a finalement pris sa succession à la tête de l’équipe australienne et a remporté une A-League en 2021. C’est tout naturellement que son ami lui a proposé de faire les 16 663 km entre Melbourne et Troyes pour rejoindre le club aubois.
1er entraîneur australien à s’asseoir sur le banc d’une équipe de l’un des 5 grands championnats, Patrick Kisnorbo est confronté à ses propres limites. Malgré ses talents de meneur d’hommes, le technicien âgé de 41 ans peine à insuffler une nouvelle mentalité aux Bleu et Blanc. C’est même l’inverse qui semble se produire avec une série de 5 défaites consécutives sans que l’équipe réagisse. Outre une défense en déliquescence, les principes de jeu prôné par le City Football Group (jeu attrayant autour de la possession) ne sont pas retranscrits sur le terrain (43% de possession de balle en moyenne, 19e équipe de Ligue 1). Un problème alors que la nomination du natif visait justement à un renforcement de la philosophie Cityzen.
Des avis divergents sur le mercato d'hiver
Le timing de son arrivée pose également question. Nommée pendant la trêve internationale liée à la Coupe du Monde, l'ancien joueur de Leeds United a débarqué un peu comme un cheveu dans la soupe sans avoir eu le temps de se préparer à une Ligue 1 complétement inconnue pour lui. Une méconnaissance du championnat que semble se payer à l'heure de l'entame de la dernière ligne droite de la saison. D'autant plus que la barrière de la langue n'aide pas à faire passer des messages à son groupe.
Lors du mercato d'hiver, des premières tensions sont apparues entre le technicien australien et son directeur sportif François Vitali. Selon les informations de Foot Mercato, Patrick Kisnorbo aurait souhaité la venue d'un joueur libre qui évoluait en Italie. Une piste qui n'a pas séduit le responsable du recrutement aubois qui voulait mettre l'accent sur des joueurs ayant déjà eu une expérience en Ligue 1. Après plusieurs échecs (Morgan Sanson et Angelo Fulgini), Jeff Reine-Adelaide et Alexis Tibidi qui ont débarqué dans l'Aube montrant un peu plus la mainmise du directeur sportif sur le club.
Ce dernier aurait bien voulu un défenseur supplémentaire. “On le juge à la dernière journée de championnat. A-t-on rempli les objectifs ? On n'a pas ajouté pour ajouter. Je pense qu'il est bon. On aurait voulu d'autres choses, mais le mercato de janvier n'est jamais facile. Le temps est limité. Il faut être certain de l'addition ajoutée. On aurait aimé avoir un joueur derrière, avec le retour d'une défense à 5” indiquait-il en conférence de presse de présentation des deux recrues.
Ce système à trois derrière (utilisé à 22 reprises à 26 matchs de Ligue 1), est également pointé du doigt par les supporters troyens. Alors que son début de mandat était caractérisé par un passage à 4 défenseurs, l'entraîneur australien est rapidement revenu à un dispositif défensif à trois sans succès. Un entêtement tactique qui là aussi puise ses racines dans les choix de la direction auboise. En effet, Aymeric Magne et François Vitali ont régulièrement évoqué l'ambition de faire performer l'ESTAC dans ce système. Pour l'instant, les résultats ne vont pas dans leur sens.
Statu quo même en cas de descente pour Troyes
Face à cette situation sportive qui devient urgente, Troyes a décidé de miser sur la stabilité. La direction du club champenois a quasiment acté le maintien de Patrick Kisnorbo la saison prochaine même en cas de descente en Ligue 2. Une rétrogradation qui ne serait pas un désaveu pour le projet du City Football Group. Dans une entrevue avec ses supporters, François Vitali a même confirmé à demi-mot que les Aubois étaient montés trop vite en Ligue 1. “Quand on visite Troyes plutôt que Dijon, les installations de Dijon sont en avance par rapport à l'ESTAC. C'est ce que le City Football Group essaie de rattraper depuis deux ans et demi. On veut aller très vite et peut être trop vite” a lancé le directeur sportif des Bleu et Blanc dans des propos rapportés par notre confrère Jonathan Sottas.
Tomber pour mieux se relever ? C'est en tout cas un scénario envisagé par l'ESTAC. Pas sûr que les supporters soient d'accord. Ces derniers ont déjà montré plusieurs fois leur mécontentement vis-à-vis de la situation du club cette saison. A la croisée des chemins, le City Football Group va devoir faire un choix à Troyes. Renforcer son autorité et son influence au détriment de l'identité du club ou écouter le cri d'alerte des fans aubois inquiet que leur club devienne une filiale.
Englué dans la zone rouge, Troyes vit une deuxième partie de saison extrêmement compliqué. Nommé en novembre dernier, l’entraîneur Patrick Kisnorbo peine à convaincre. A travers sa personne, c'est l'ensemble du projet du City Football Group dans l’Aube qui pose question.