Après onze mois fournis en évènements sportifs, notamment à cause du report de nombreuses compétitions qui devaient avoir lieu l’an passé, le mois de décembre conclut un cru 2021 riche en émotions. De la septième bague de Tom Brady au titre de champion du monde de Fabio Quartararo en MotoGP, en passant par les Jeux olympiques et paralympiques, We Sport revient sur 30 moments marquants qui ont rythmé l’année civile. Retour aujourd'hui sur le formidable parcours de l'équipe de France masculine de basket, médaillée d'argent aux JO de Tokyo, terrassée uniquement par Team USA en finale. Le rendez-vous est pris pour Paris 2024. 

Une préparation compliquée

Rien n'aura été simple dans une saison post-covid à rallonge. Privé de ses joueurs NBA et Euroleague toute la saison comme à l'accoutumée, Collet a vu arriver les sélectionnés au compte goutte, au fil de la préparation. Si les Européens ont pu débarquer rapidement, les états de forme divergeaient : Thomas Heurtel, dont la saison en dents de scie (blacklisté au Barça, non qualifié pour l'Euroleague avec l'ASVEL) a été compliquée à gérer, est venu blessé, les Villeurbannais Fall et Yabusele sont arrivés sur les rotules, Poirier n'a pas joué jusqu'à mi-avril avant de revenir expressément au Real pour tenter de décrocher sa place aux JO… Sans compter que la préparation a commencé sans Rudy Gobert et Nico Batum, toujours engagés en playoffs NBA. Pas l'idéal. Les résultats s'en sont ressentis : 3 défaites, 2 face à l'Espagne, puis une contre le Japon à Tokyo pour parachever un gros bloc de travail qui aura au moins eu le mérite de redonner quelques sensations à des joueurs en manque de temps de jeu (Ntilikina, Luwawu-Cabarrot). Des joueurs placardisés en NBA, mais malgré tout sélectionnés par Vincent Collet. L'homme fort des Bleus depuis 12 ans a d'ailleurs fait d'autres choix forts, en laissant par exemple sur la touche son “chouchou”, Paul Lacombe, ou encore le vainqueur de l'EuroCup Mathias Lessort. William Howard et Louis Labeyrie, de solides joueurs référencés au niveau européen, ont également été mis de côté. Amath M'baye blessé, l'actuel entraîneur des Metropolitans a fait appel à l'inexpérimenté Petr Cornelie, emmenant également 3 vrais pivots (Fall-Poirier-Gobert) aux profils similaires, ce qui a pu faire parler. Mais la mission est claire : ramener une médaille. Et au sein de la délégation, tous ne pensent qu'à la plus belle.

Une entame de rêve

Mais pour cela, il va déjà falloir se coltiner les USA, et ce dès le premier match ! La dernière confrontation avait tourné à l'avantage des Bleus, lors du mondial 2019 en Chine. Mais là, l'armada américaine est d'un tout autre calibre: Kevin Durant, Damian Lillard, Devin Booker, Jason Tatum pour ne citer qu'eux. Après une première période où la classe américaine a fait la différence (45-37 à la pause), Collet va alors sortir une arme qu'il utilisera à plusieurs reprises tout au long de l'olympiade. Une raquette XXL avec deux pivots, pour gêner la bande à Popovich, jouant principalement “small-ball”, avec Adebayo et Green à l'intérieur. Résultat, un troisième quart-temps de haute volée, sous l'impulsion d'un Evan Fournier en mission (28 pts, 4 rbds au final). KD limité, Team USA a ronronné et n'a pas eu les ressources nécessaires pour renverser la vapeur. Les Tricolores frappent fort d'entrée, et peuvent voir la suite du premier tour plus sereinement.

En effet, la République tchèque et l'Iran sont d'un tout autre acabit que les États-Unis. Face aux coéquipiers de Satoransky, les Français ont démarré en mode diesel, un quart-temps durant, avant de prendre la pleine mesure d'un adversaire limité. Si Vesely a tenté de surnager, Fournier a encore cartonné (21 pts), De Colo a distribué (17 pts, 8 asts) et Poirier a démontré que le jeu FIBA correspondait bien mieux à ses qualités (14 pts, 5 rbds). Face à l'Iran pour le dernier match, Collet a pu faire souffler ses cadres, et d'autres ont pu se montrer. Heurtel a scoré 16 pts, Luwawu-Cabarrot a réalisé un match complet (12 pts, 5 rbds, 3 asts) et le douzième homme, Petr Cornelie, dernier arrivé, a eu quelques minutes (2 pts, 5 rbds et 2 asts en 11 min). 3 victoires en 3 matchs, la première partie du contrat est parfaitement remplie. Team USA dans l'autre partie du tableau, tout comme l'Espagne et l'Argentine, les Bleus vont maintenant devoir assumer leur statut : tout autre résultat qu'une finale serait maintenant un échec.

Une équipe, une vraie

Mais si les Français semblent légèrement au-dessus de la mêlée, il ne faut négliger personne. En premier lieu l'Italie, qui se dresse sur la route d'une médaille. Victorieux du Nigéria et de l'Allemagne, défaits d'une courte tête par les redoutables Australiens, les Transalpins ont de sérieux arguments à faire valoir. Avec des joueurs comme Gallinari, rien n'est jamais joué d'avance. Malgré tout, l'effectif plus complet doit permettre aux Bleus de franchir le palier. Et la rencontre, d'abord serrée, a ensuite tourné en faveur des Tricolores, sous l'impulsion d'un Rudy Gobert dominateur (22 pts à 10/13). Largement supérieurs dans la raquette, les Français ont soudainement arrêté de jouer, l'Italie effaçant alors ses 14 pts de retard, grâce à un Fontecchio de gala (23 pts). Finalement, Nico Batum (15 pts, 14 rbds, 3 asts, 2 blks, 3 stls) en leader a permis aux siens de finir sereinement la rencontre (84-75 au final).

En demi-finale se dresse la Slovénie de Luka Doncic. Et c'est alors qu'arriva le chef-d'œuvre de l'année. Collet s'attendait à être bousculé, chahuté. Ses joueurs sont rentrés timidement dans la rencontre, qui reste malgré tout équilibrée. En effet, une seule fois une équipe a compté plus de deux possessions d'avance en première période. Si, sur le papier, le roster Slovène paraît moins clinquant que celui des champions d'Europe 2013, le simple fait de jouer aux côtés de Doncic galvanise. La pépite Maverick bonifie tout ce qui est autour de lui. Comme Mike Tobey, sensationnel ce jour-là (23 pts, 5 rbds, 3 asts), ou encore l'ancien des Metropolitans, Prepelic (17 pts). Très en jambe dans le premier quart (10 pts, 5 rbds, 5 asts), Doncic, maladroit, va quelque peu s'agacer et les Bleus vont prendre la mesure de leur adversaire au fur et à mesure de la rencontre. Et compter jusqu'à 10 pts d'avance, en fin de 3e quart, sous l'impulsion du duo De Colo (25 pts, 7 rds, 5 asts) – Fournier (23 pts, 5 rbds, 3 asts). Mais c'était sans compter sur la fougue des Balkans, revenus à égalité à moins de deux minutes du terme. Très clutch, Luwawu-Cabarrot (15 pts, 5 rbds) a alors envoyé une bombe pour faire souffler les siens, mais dans une fin de match mal maîtrisée, les Français ont offert à la Slovénie une balle de match. 1 pt d'écart, dernière possession pour Doncic et les siens. L'ancien du Real, défendu par Batum, oblige les Français à switcher, et Gobert se retrouve alors face à lui. Peu en réussite lors du second acte, assez bien trappé, il décide alors de décaler Prepelic, voyant Batum légèrement en retard. L'actuel Valencian décide alors de partir au drive, voyant le cercle ouvert. C'est précisément maintenant que Batman va déployer ses ailes. Dépassé, il va alors revenir par derrière et poser un contre MONUMENTAL contre la planche à 2 secondes du buzzer, pour envoyer la France en finale des JO. Prepelic et les siens n'en reviennent pas. Nic' vient de scotcher le shoot de la gagne, un contre d'anthologie qui restera dans les mémoires. Les Bleus peuvent exulter, ils sont qualifiés pour la finale des JO, et rentreront, quoi qu'il arrive, avec une breloque. Le rendez-vous est pris. Et il ne faudra pas changer pour de l'équitation.

Une dernière marche inaccessible

Forts de deux succès lors des deux derniers affrontements face à Team USA, les Tricolores arrivent gonflés à bloc. Mais les Américains sont montés en température depuis leur revers initial face à ces mêmes Bleus. Durant est sur un nuage, et chacun leur tour, ses coéquipiers prennent un coup de chaud : le dernier en date, Devin Booker, auteur de 20 pions pour sortir de valeureux Australien. La menace peut venir de partout. Mais elle viendra principalement de KD une nouvelle fois. En mission, l'ailier des Nets n'a pas touché terre de la compétition, et il n'avait pas prévu de s'arrêter avant d'avoir sa médaille d'or autour du cou. Avec 29 pts, 6 rbds, et 3 asts, il a littéralement marché sur la rencontre. Bien suppléé par Jason Tatum (19 pts, 9 rbds), il a prouvé en monde entier qu'il était peut-être le meilleur joueur de basket à l'heure actuelle. En face, les Français n'ont que vaguement fait illusion en début de rencontre, mais le manque d'adresse longue distance (31 %) a coûté cher. Relégués à deux ou trois possessions tout au long du match, ils n'ont guère existé. Une défaite rageante, car il y avait malgré tout une chance, un espoir de faire tomber une troisième fois consécutive Team USA. Mais une médaille d'argent qui a un goût doré. Que peuvent se reprocher les Bleus sur la compétition? Absolument rien. Kevin Durant était juste au-dessus de la mêlée.

Objectif médaille atteint pour les hommes de Vincent Collet, venus chercher une breloque, repartis de Tokyo parés d'argent. Six matchs, cinq victoires dont une historique face à Team USA, une fin de demi-finale qui restera gravée à tout jamais, et une courte défaite en finale face à plus fort. La campagne olympique a tout d'une réussite. Les cadres avaient donné rendez-vous, ils ont répondu présent. En parlant de rendez-vous, prenez date pour l'été 2024. Revancharde, cette équipe a clairement coché, déjà, dans un coin de sa tête, les JO de Paris. Avec une fabuleuse génération qui arrive (Maledon, Wembanyama, Hayes) et des cadres dans la force de l'âge, la revanche s'annonce palpitante.