Battu par le Borussia Mönchengladbach, le Hertha Berlin s’enfonce dans les bas-fonds de la Bundesliga. Le club de la capitale est relégable à huit journées de la fin de saison. Pourtant racheté en 2019, les nouveaux dirigeants avaient placé la barre haute. Aujourd’hui, le double champion d’Allemagne est en danger et reste sur 5 défaites consécutives.
C’est la défaite de trop. Après le match perdu sur la pelouse du Borussia Park face aux Poulains de Gladbach ce week-end, l’entraineur du Hertha Berlin Tayfun Korkut a été licencié. Arrivé en novembre dernier, le Turc a été remercié. Il s’agit du troisième entraineur renvoyé du club depuis janvier 2021. En crise depuis plusieurs rencontres, le club a nommé Felix Magath qui va tenter de redresser la situation de l’équipe. Son expérience de la Bundesliga (champion d’Allemagne avec le Bayern en 2005 et 2006, et avec Wolfsburg en 2009) va être clé dans l’opération maintien qui attend les Berlinois.
Cependant, l’opération n’est pas impossible pour la deuxième pire défense de Bundesliga. La Veille Dame compte seulement 2 points de retards sur l’Arminia Bielefeld, premier non relégable. Mais les prochaines semaines s’annoncent compliquées. Puisque le Hertha devra jouer contre Hoffenheim et le Bayer Leverkusen, tous deux en quête d’un podium. Cependant, le maintien pourrait se jouer dans les ultimes journées. Les hommes de Felix Magath vont enchainer un déplacement à Augsbourg pour la 30e journée, puis la réception de Stuttgart et un déplacement à l’Arminia. Trois journées capitales dans une quête d’un maintien crucial pour l’avenir du club.
Pilier historique de Bundesliga, la Veille Dame a été rachetée en 2019 par Lars Windhorst. Le nouveau propriétaire a acquis en novembre 49,9% des parts faisant passer le budget de 125 à 250 millions d’euros, nouveau record en Bundesliga pour des investisseurs étrangers. L’objectif de Windhorst est simple, il veut « jouer le titre d’ici 3 à 5 ans ». Mais que s’est-il passé entre temps ? Comment le projet du Hertha s’est écroulé en seulement 3 ans ? Entre instabilité et mercato raté, retour sur la débâcle du club de la capitale.
Une saison désastreuse
17e à l’aube de la 27e journée, le Hertha Berlin est relégable. La situation du club inquiète, deuxième pire défense du championnat, les coéquipiers de Dedryck Boyata ont déjà encaissé 60 buts cette saison. L’effectif est également muet offensivement, troisième pire attaque du championnat avec seulement 26 buts marqués.
Arrivé libre cette saison de Monaco, Stevan Jovetic est le meilleur buteur du club avec uniquement 6 petites réalisations. Cette inefficacité dans les deux surfaces peut en partie expliquer la situation du club cette saison. Mais les Berlinois ne sont pas au bout de leur peine. À l'extérieur, l’équipe de Felix Magath devront trouver plus d’efficacité s’ils veulent espérer se maintenir. Seulement 9 buts marqués pour 33 encaissés en dehors de leur terre. Dans Olympiastadion, l’efficacité offensive est meilleure (17 marqués) mais ils restent la 16e équipe à domicile du championnat. La différence de but (-34) pourrait également coûter cher dans une course au maintien serrée.
Cependant, la Veille Dame doit redresser la barre après 5 défaites consécutives. Le Hertha finit également très mal ses matchs avec 9 buts sur 15 encaissés dans la dernière demi-heure sur les 4 dernières rencontres. Le club de la capitale a également perdu des points contre la lanterne rouge Greuther Fürth, battu 2-1 lors de la phase retour. Seul Mainz et l’Union se sont inclinés cette saison contre les Trèfles. Malgré deux rencontres compliquées lors des deux prochaines journées, le Hertha pourrait bénéficier des matchs de ses concurrents directs puisque Stuttgart 16e accueillera Augsbourg 14e puis se déplacera à l’Arminia Bielefeld 15e après la trêve internationale.
Des mercatos ratés
Dès son arrivée en 2019, le fonds d’investissement Tennor Holding s’engage à investir 125 millions d’euros pour réparer les dettes. En novembre de la même année, la société d’investissement récupère 49,9% des parts du club, ce qui annonce un mercato hivernal plein de promesse. Mais lors de l’hiver 2020, le Hertha essuie plusieurs refus. Mario Götze, Julian Draxler, Emre Can ou encore Granit Xhaka retenu par l’entraineur fraichement nommé du côté des Gunners Mikel Arteta. Cependant, le club avait déjà commencé le chantier l’été, avec les arrivées de Dodi Lukébakio pour 20 millions d’euros ou d’Eduard Löwen pour 7 millions d’euros.
Lors du mercato hivernal 2020, le club enregistre 4 grosses arrivées, Luca Tousart arrivant de Lyon pour 25 millions d’euros. Le français a d’ailleurs honoré son 50e match en Bundesliga contre Fribourg il y a quelques semaines. Krzysztof Piatek pour 24 millions d’euros. Matheus Cunha pour 18 millions et Santiago Ascacibar en provenance de Stuttgart pour 10 millions d’euros. 77 millions d’euros dépensés (source : Transfertmarkt) mais le club de la capitale peine à confirmer en championnat. Le club termine 10e du championnat et vit un début de deuxième partie de saison chaotique.
Nommé après l’éviction d’Ante Covic fin novembre, Jürgen Klinsmann va en février 2020 annoncer son départ du club. Problème, le coach de la Veille Dame l’annonce dans un poste Facebook prenant tout le monde de court. La veille encore, il avait fait un live, toujours sur Facebook, pour parler avec les supporters du reste de la saison et des projets à venir. Le directeur sportif, Michael Preetz, déclare qu’ils n’avaient eux-mêmes pas été mis au courant de la décision. Le club va donc nommer en intérim Alexander Nouri jusqu’en avril, puis confirmera l’arrivée de Bruno Labbadia.
Quatre entraineurs différents dans une saison marquée par l’épidémie de Covid-19 qui force l’arrêt des championnats. Le Hertha est sous le feu des projecteurs et souffre d’une instabilité grandissante. Depuis juillet 2019, le club a connu 7 entraineurs différents. Lors de la saison suivante en 2020-2021, le club enregistre des nouvelles arrivées. Jhon Córdoba, Matteo Guendouzi, Nemanja Radonjic ou encore Alexander Schwolow. Malgré toutes les arrivées, le club termine encore une fois loin de ses ambitions. Une 14e place avec seulement 4 petits d’avance sur le premier relégable, le Werder Brême. Néanmoins, le club réalise quelques bons coups financiers. Córdoba part en direction de Krasnodar pour 20 millions d’euros ou encore Matheus Cunha vendu à l’Atletico pour 26 millions d’euros.
Un point historique
Le Hertha Berlin n’est pas forcément le club allemand le plus connu, mais il n’en est pas moins historique. Fondé le 25 juillet 1892, le Hertha trouve son nom grâce à un bateau à vapeur bleu et blanc sur lequel un des fondateurs naviguait. Le nom Hertha est une variation de Nerthus, déesse de la fertilité dans la mythologie germanique. Le club de la capitale allemande vogue avec l’histoire de son pays. Comme beaucoup d'équipes allemandes, le club a fusionné avec les autres institutions sportives berlinoises. C’est en 1923 et depuis la fusion avec le Berliner Sport Club que le Hertha pris son nom actuel : Hertha BSC. De plus, c’est dans les années 20, le club devient l’un des moteurs du football germanique. Le club finit vice-champion d’Allemagne lors de cinq saisons consécutives entre 1926 et 1929. Mais lors de la saison 1930, le club va enfin finir par décrocher le graal. Le club de la capitale remporte la finale contre Holstein Kiel 5-4 et glane son premier titre. Le club récidive l’année suivante contre le TSV Munich 1860 en s’imposant 3 buts à 2. Ce sont à ce jour les deux seuls titres de champion d’Allemagne du Hertha Berlin. Néanmoins, le Hertha fut le deuxième club allemand le plus titré pendant la période d'entre-deux guerres.

Source : Biberbaer
La montée du fascisme
Comme toute l’Europe, le football et le Hertha ont été impacté par la montée du fanatisme et du fascisme en Europe et notamment en Allemagne. En 1933, l’Allemagne bascule et Hitler prend le pouvoir. Le football fut remanié et le club de la capitale remporte trois titres au sein de son championnat en 1935, 1937 et 1944. Le club est privilégié politiquement dû à son nouveau président, Hans Pfeifer, membre du parti Nazi. À la fin de la guerre, le club est refondé et prend le nom de SG Gesundbrunnen et participe au championnat d’Oberliga Berlin.
Mais les tensions entre le bloc occidental et le bloc communiste ne vont rien arranger. La Veille dame fut interdit de jouer contre les clubs de Berlin Est. Certains supporters du club ne pouvaient plus aller voir leur équipe jouer à la suite de la construction du mur. Le Hertha comme l’ensemble du football allemand subit les conséquences de l’histoire.
Entre dettes et coup d’éclat
Lorsque la Bundesliga est créée en 1963, le Hertha Berlin est champion en titre du championnat berlinois et fut donc membre de la première édition. Le club se maintient, mais lors de la saison 1964-1965 des scandales de corruption éclate et le club est relégué en deuxième division. Malgré un retour dans l’élite en 1968, le club est endetté. Obligé de vendre son terrain pour survivre, le club va tout de même connaitre un âge d’or. Deuxième de Bundesliga en 1975 derrière le Borussia Mönchengladbach, le club se hisse également en demi-finale de Coupe UEFA en 1979 contre l’Étoile Rouge de Belgrade.
Le club participe par ailleurs à deux finales de Coupe d’Allemagne en 1977 et 1979, battu par Cologne puis par le Fortuna Düsseldorf. Malgré un palmarès vierge, le Hertha retrouve les sommets du football allemand. Dans les années 80, le club va traverser une période compliquée. Relégué en deuxième division dans laquelle le club passe 13 des 17 prochaines saisons, le club n’en reste pas moins le plus populaire de la capitale. Malgré une finale de coupe contre le Bayer Leverkusen, le club est même rétrogradé en troisième division.
Le retour dans l’élite
En 1994, la dette rattrape une nouvelle fois la Veille Dame. Le club doit trouver 10 millions de deutsche mark. En 1997, le pire est évité avec la vente de la propriété immobilière et la venue d’un nouveau sponsor. Le club retrouve l’élite en 1997 ce qui met fin à 6 ans de disette pour un club berlinois. La Bundesliga retrouve enfin un club de sa capitale dans son championnat, un record. Aux côtés de Kjetil Rekdal, Michael Preetz ou encore Marcelinho, le club remporte deux Coupes d’Allemagne en 2001 et 2002. La capitale retrouve les soirées de coupe d’Europe. Malheureusement, le club ne laisse pas une empreinte indélébile sur la scène européenne. Lors de la saison 2009-2010, le club est relégué, mais remonte en 2013 et n’a plus quitté la Bundesliga depuis.
Le Hertha Berlin au même titre que les Girondins de Bordeaux font partie de ces clubs historiques en danger cette saison. Un mauvais investissement sur le mercato, une instabilité grandissante au fur et à mesure des années n’ont pas aidé le club de la capitale.
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