On reproche souvent le manque de leader dans le tennis féminin. Mais Naomi Osaka semble être la candidate parfaite pour prétendre à ce rôle. Lauréate de son quatrième Grand Chelem à seulement 23 ans, la Japonaise s'impose de plus en plus comme la patronne du circuit féminin.
Décryptage d'une athlète qui a tout pour devenir la nouvelle icône du tennis mondial.
Une patronne sur le court
A seulement 23 ans, Naomi Osaka a déjà remporté son quatrième tournoi Majeur pour autant de finales disputées. Elle est la première joueuse (hommes ou femmes) à remporter un quatrième titre du Grand Chelem en simple depuis Maria Sharapova à Roland Garros 2012. Et tout est allé très vite pour Naomi. En l'espace de 2 ans, la Japonaise est devenue la patronne des courts avec deux US Open et deux Open d'Australie. Son tennis et son service puissants sont ce qu'il se fait de mieux sur le circuit à l'heure actuelle. Mais surtout, c'est la sérénité et la force mentale qu'elle laisse transparaitre durant ses matchs, même lorsqu'elle est en difficulté, qui impressionnent. Dans un circuit instable en manque de véritable leader, Naomi Osaka a fait sa place, notamment sur surface dure, où elle a remporté tous ses titres. Il lui reste maintenant à développer tout son potentiel sur gazon et terre battue pour avoir une main mise totale sur le circuit féminin.
.@naomiosaka en Grand Chelem depuis qu'elle est rentrée dans le top 20 (mai 2018) :
▫️ A Roland Garros et à Wimbledon
✅✅❌✅✅❌✅✅❌❌▫️ A l'Open d'Australie et l'US Open
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Aujourd'hui, Naomi Osaka ne cache plus ses ambitions. Toujours plus solide et plus forte d'année en année, la Japonaise vise haut :
“J’ai cette mentalité : les gens ne se souviennent pas des finalistes. Le nom du vainqueur est celui qui est gravé. Je pense que je me bats aussi dur que je le peux en finale. C’est là que vous vous démarquez en quelque sorte.”
“Quand j’étais plus jeune, il y a 2 ans environ, le ressenti, l’objectif, c’était de marquer l’histoire. Je voulais être la première joueuse japonaise à gagner un Grand Chelem. C’était mon but. (…) Mais je vois encore plus grand maintenant.”
Une athlète au fort pouvoir marketing
Son premier succès en Grand Chelem lors de l'US Open 2018 n'était qu'un point de départ de la genèse de la star qu'elle est aujourd'hui. On pourrait pourtant se poser la question : pourquoi Naomi Osaka est plus “bankable” que ses collègues du circuit telles que Simona Halep et Ashleigh Barty ?
Plusieurs éléments peuvent répondre à cette question. Tout d'abord, Naomi Osaka bénéficie d'une double culture japonaise et américaine. Née au Japon d'une mère japonaise et d'un père haïtien, Naomi grandit aux Etats-Unis. Sa double culture ainsi que sa personnalité attachante font d'elle une joueuse particulièrement appréciée. Son pouvoir médiatique attire un public de plus en plus large, et de facto, de nombreux sponsors. A tel point qu'en 2020, Naomi Osaka est devenue l'athlète féminine la mieux rémunérée au monde avec plus de 37,4 millions de dollars de recettes. Elle détrône ainsi les superstars Maria Sharapova et Serena Williams.


La Japonaise est devenue si attractive que Nike lui a dédié son propre logo avec sa propre identité visuelle. Notons que seules les superstars, à l'instar de Roger Federer ou Rafael Nadal bénéficient de leur propre collection auprès des équipementiers textiles. Un privilège dont bénéficie Naomi Osaka à seulement 23 ans.

Accompagnée par IMG qui a représenté les plus grandes stars du circuit comme Sharapova, Osaka compte aujourd'hui pas moins de 15 sponsors, tels que Nissan, Shiseido, Tag Heuer, Louis Vuitton, Workday, MasterCard, Nissin Foods, BodyArmor, Muzik et Hyperice.

Crédit photo : AFP
Une joueuse attachante
La cérémonie de remise des trophées lors de l'US Open 2018 avait viré au cauchemar pour Naomi Osaka alors qu'elle venait remporter son tout premier Grand Chelem. Dans un stade plein acquis à la cause de Serena Williams qui avait perdu ses nerfs durant la finale, la jeune Japonaise alors âgée de 21 ans s'était laissée submerger par l'émotion. Le grand public découvrait une joueuse attachante, rongée par la timidité et peu à l'aise en public ou derrière un micro. En somme, Naomi Osaka laisse transparaitre une jeune femme sensible et pleine d'humanité, ce qui manque parfois cruellement dans ce sport où chaque fait et geste sont contrôlés.
Une athlète engagée
Mais en l'espace de deux ans, Naomi Osaka s'est métamorphosée. En septembre 2020 lors du tournoi de Cincinnati, la Japonaise sort de son silence et de sa timidité pour protester contre les violences policières qui sévissent aux Etats-Unis. Elle s'impose comme la leader du mouvement Black Lives Matter dans le tennis, et refuse de jouer sa demi-finale en signe de protestation. Les organisateurs suivent sa décision, et décident de mettre le tournoi sur pause le temps d'une journée. Une décision qui sera par ailleurs saluée par la majorité de ses collègues sur le circuit.
“En tant que femme noire, j’ai l’impression qu’il y a des questions beaucoup plus importantes qui nécessitent une attention immédiate, plutôt que de me regarder jouer au tennis”.
— NaomiOsaka大坂なおみ (@naomiosaka) August 27, 2020
Lors de l'US Open 2020, elle continue d'apporter son soutien au mouvement Black Lives Matter. Elle porte un masque arborant le nom d'une victime de violences policières à chaque entrée sur le court. Osaka en avait prévu sept. Et en grande championne, elle est allée au bout du tournoi et a pu rendre hommage aux sept victimes pour qui elle avait dédié un masque.
Celle qui avait peur de prendre la parole en public en 2018 a laissé sa place à une star engagée.

Dans un monde du tennis de plus en plus aseptisé, Naomi Osaka est allée bousculée l'ordre établi. En tant que femme noire et à la double culture, elle représente aujourd'hui une figure du militantisme contre les violences policières et des inégalités.
Sur et en dehors du court, la Japonaise s'impose de plus en plus comme la nouvelle patronne du tennis féminin. Jusqu'où ira t'elle ?