2 ans, 730 jours, 17 520 heures. Tels sont les chiffres séparant le Portugal de son historique victoire à l'Euro 2016. La libération de tout un peuple était alors advenue, 12 ans après le naufrage de la Seleção au championnat d'Europe 2004. Une défaite en finale contre la Grèce avait privé le Portugal, grand favori de la compétition, de son rêve : remporter un trophée majeur. We Sport FR vous propose une rétrospective de ce désastre national, qui a meurtri 11 millions de Lusitaniens.
Une haletante organisation

Le 12 octobre 1999, l'UEFA retient la candidature du Portugal présentée pour l'Euro 2004. N'en déplaise à l'Espagne et à l'Autriche-Hongrie qui avaient eux aussi postulés, le pays des Œillets organisera sa première compétition prééminente. 10 nouveaux stades sont construits, pour un coût total de 665 millions d'euros et une capacité finale de 376 000 places. Les plus grandes enceintes sont celles des clubs institutionnels, à l'image de celle de Benfica (65 000 sièges) ainsi que de Porto et du Sporting (50 000.) Les autres stades sont dispersés dans d'importantes localités du pays (Braga, Guimarães, Coimbra…) Le système autoroutier est refait à neuf pour l'occasion. Le gouvernement décide de fermer les frontières du territoire, pour des raisons de sécurité interne et d'ordre public. L'UEFA admettra quelques années plus tard que l'Euro 2004 fut le meilleur de tous les temps en terme de préparation et de collaboration.
Un élan d'engouement se créer au sein du peuple Portugais, émerveillé par l'une des meilleures générations de l'histoire de son football. Un effectif portugais annoncé comme favori et emmené par Luis Figo, Rui Costa, Deco, Pauleta. Mais aussi par la révélation Cristiano Ronaldo. Le rêve inouï d'un premier sacre international engendre une mobilisation sans précédent. Du nord au sud du pays, plusieurs millions de Portugais accrochent leurs drapeaux aux fenêtres. Cette initiative donnera naissance à une pratique aujourd'hui généralisée partout dans le monde. Celle de faire flotter le drapeau de son pays lors de compétitions sportives. C'est dans cette fervente atmosphère que débarquent les équipes qualifiées. Cette édition n'accueille aucune nouvelle nation : pas de surprises lors des qualifications.
Un fantastique parcours

Lors du match d'inauguration à Porto, la Seleção chute face à la Grèce. Cette défaite 2-1 ravive la peur d'une élimination en phase de groupes, comme ce fut le cas lors du mondial 2002. Le Portugal fait rapidement taire les critiques avec de belles victoires face à la Russie (2-0) puis contre l'Espagne (1-0.) La formation de Felipe Scolari finit première de son groupe, tandis que les Grecs dérobent la seconde place aux Espagnols. Le 1/4 de finale opposant le Portugal à l'Angleterre donne lieu à l'une des confrontations les plus captivantes de la compétition. Michael Owen ouvre la marque en début de partie pour les Three Lions. L'égalisation d'Helder Postigua en toute fin de rencontre génère d'époustouflantes prolongations.
Elles sont marquées par des buts de Rui Costa (Portugal) et Franck Lampard (Angleterre.) Score final : 2-2. Direction les tirs au but, où la Seleção l'emporte 6-5 grâce à un formidable arrêt de Ricardo. Un exercice damné par les Britanniques qui ont manqué 6 de leurs 8 séances entre 1990 et 2018. En demi-finale, le Portugal s'impose 2-1 face aux Pays-Bas, dans une rencontre nettement mieux maîtrisée. Cristiano Ronaldo et Maniche sont les principaux protagonistes de cette victoire.
De son côté, la Grèce créer la surprise en éliminant les deux autres grands favoris. Les hommes d'Otto Rehhagel s'imposent face à la France en quart de finale. Puis ils éliminent la République-Tchèque, grâce à un but en argent de Traianos (l'équipe menant à la fin de la première mi-temps des prolongations est déclarée gagnante.) Mais quels arguments ont permis à cette modeste équipe de vaincre de si puissantes formations ? Un système défensif imparable et un marquage individuel probant, et la Grèce est en finale, pour sa 3ème participation à une compétition internationale ! Du côté des autres grandes nations, l'Allemagne et l'Italie sont sorties en phase de groupes.
Une fin cauchemardesque
Et c'est ainsi que le Portugal se retrouva propulser en finale, face à la Grèce. C'était trop beau pour être vrai. Cette phrase à l'aspect insipide résume pourtant admirablement le cataracte de la Seleção, alors que ses chances de sacre étaient au summum de leur exacerbation. Poussé par un public exultant, Luis Figo et ses coéquipiers surplombent la Grèce mais ne parviennent pas à mystifier la défense adverse. Angelos Charisteas. Cet homme pourrait aisément être comparé à Lord Voldemort tant il est blasphémer par les Portugais. 57ème minute. Corner, tête, but de la Grèce. Les incommensurables efforts de la formation rouge pour égaliser n'y changeront rien. La Grèce de Zagorakis est championne d'Europe, pour la première fois de son histoire. Une profonde déception pour les amateurs du beau jeu. Mais si la Grèce n'a pas brillé, elle n'a certainement pas volé sa victoire. Réalisme rime avec succès.
Inutile de décrire ce qui ne peut l'être. Les larmes des Lusitaniens, sur le terrain, dans les tribunes et partout dans le pays, suffisent à traduire cette déchirante tristesse. La souffrance est similaire chez les Portugais de France, dont certains liront ces lignes non sans une once de mélancolie. 12 ans plus tard, c'est justement dans l'Hexagone que la Seleção tient sa revanche. Au terme d'un Euro laborieux emmené par une génération moins ragoutante, le Portugal se défait d'une France favorite en finale et remporte enfin son premier trophée majeur. C'est alors au tour de notre peuple de vivre cette terrible désillusion…
Il est de ces compétitions où la position de leadership n'est pas constamment fructueuse. A l'Euro comme à la Coupe du Monde, penser avoir fait le plus dur avant même d'avoir soulever le trophée est un cruel sophisme. Le Portugal et la France en sont désormais avertis.
A lire aussi : Les calendriers de la Liga NOS 2018-19 dévoilés. A lire aussi : Pourquoi le football portugais va-t-il mal ?