J8 – Europe 2007 : Winkelhock s’est (re)fait un nom
Pendant 30 jours, la rédaction F1 va vous proposer une rétrospective sur un Grand Prix particulier. Que ce soit un GP des années 70 ou tout récent, toutes les générations vont y passer, avec un prisme différent à chaque fois. Des joies, des larmes, des tragédies, des intempéries … de nombreux événements ont marqué le monde de la F1 jusque là. Aujourd’hui, retour sur le GP d’Europe 2007, couru sous une pluie battante au Nürburgring. Winkelhock, tout nouveau pilote de Formule 1, y courrait alors sa seule et unique course de F1.
Winkelhock, fils de pilote
Le père de Marcus, Manfred, avait ouvert la voie aux Winkelhock en F1. Ne marquant que 2 points en 5 ans, son passage ne fut pas brillant pour autant. En 47 départs, l’Allemand ne pu faire mieux que 5e, au GP du Brésil 1982. À bord de son ATS, motorisée par Ford, l’Allemand traînait souvent en fin de peloton. Beaucoup plus performant en Endurance, le père de Marcus y trouva la mort en 1985, aux 1000 km de Mosport, à bord d’un prototype Porsche. Au 69e tour, l’Allemand tire tout droit, et envoie sa 962C du team Porsche Kremer Racing dans le mur, provoquant des lésions irréversibles.
Le frère de Manfred, Joachim, était lui aussi connu dans le monde de l’automobile. Celui que l’on surnommait « Smokin’ Joe » eut une carrière riche en Endurance et à bord de voitures de tourisme. Il se présenta également 7 fois à des courses de Formule 1, sans pour autant réussir à se qualifier une seule fois. L’écurie AGS Racing, ancien constructeur de Formule 1 français, ne lui apportant aucunement une voiture fiable. Il ne courra donc aucun GP en 1989. Pour autant, l’Allemand se révélait brillant à bord d’une voiture, gagnant même les 24H du Mans en 1999 avec BMW.
Marcus Winkelhock, quant à lui, débaque en F1 en 2006 chez Midland, en tant que pilote essayeur. Il participe à 4 séances d’essais en 2006 : en Allemagne, en Australie, à Bahreïn et en Hongrie. L’année suivante, il décroche un volant au lendemain du licenciement de Christijan Albers, chez Spyker (anciennement Midland). Très souvent dominé par son jeune coéquipier Adrian Sutil, le Néerlandais se fait débouter après le GP de Grande-Bretagne. Winkelhock est alors au départ du GP d’Europe 2007.
Le Nürburgring en eaux troubles
Auteur d’une séance de qualifications très médiocre, à plus d’une seconde et demie de son coéquipier, Marcus Winkelhock prend alors un pari fou. Le tour de formation n’est pas terminé que le pilote rentre aux stands chausser des pneus pluie. Au loin, de gros nuages chargés d’eaux sont percevables. Le pari est pris, et il est réussi. À la fin du premier tour, la plupart des pilotes s’engouffrent dans la voie des stands, pour chausser les pneus pluie. Presque tous, mais pas Räikkönen. Le Finlandais, qui tentait de rentrer au stands, patine complètement et se fait éjecter de la voie, sans pouvoir plus y rentrer. Il est alors forcé de faire un tour de plus en pneus slicks.
La pluie s’abat sévèrement, et les premières voitures atterrissent dans le bac à gravier. Button, Sutil, Rosberg, Liuzzi et Speed finissent leur course dans les graviers du virage 1. L’eau y est très présente, et l’aquaplaning empêche les pilotes de freiner correctement. Hamilton y atterrit aussi, mais est remis en piste de manière incroyable par une grue. Winkelhock, au milieu de cette cohue, s’empare de la tête. Pendant 6 tours (dont 3 sous régime de SC), le pilote Spyker mènera la danse, grâce à une stratégie incroyable. Lorsque le drapeau rouge est abattu, et que toutes les voitures se regroupent sur la grille, l’Allemand est en tête.
Après une interruption pour dégager les voitures coincées dans le gravier, et attendre une accalmie, les voitures sont remises sur la grille pour un deuxième départ. Lors du restart, Winkelhock ne fait pas le poids face à Massa et Alonso, qui plongent tous les deux au premier virage et débordent la Spyker. Le rêve s’éteint pour Marcus Winkelhock. Quelques tours plus tard, victime d’une casse mécanique, le pilote abandonne. Ce GP constitue le seul auquel il a participé, remplacé dès le GP suivant par Sakon Yamamoto, faute de financement.
Au terme d’une course longtemps menée par Massa, Alonso l’emporta finalement, avec un dépassement très autoritaire sur le Brésilien. Leurs voitures pouvaient même en témoigner à l’arrivée, la peinture arrachée après leur âpre contact. Dans l’antichambre du podium, les deux pilotes eurent même une discussion musclée, l’un reprochant à l’autre cet accrochage. Mais le fait le plus marquant, associé directement à une personne particulière, fut bien sûr les tours en tête de Winkelhock. Inscrivant son nom et celui de Spyker à la liste des pilotes et écuries en tête d’un GP, l’Allemand n’est certainement pas prêt d’oublier un jour ce GP d’Europe 2007.