Paris Grand Slam 21 : quatorze médailles d’anniversaire
Ce ne sera probablement pas une édition qui restera dans les annales, malgré l’évènement que représente ce cinquantième anniversaire.
Avec des règles sanitaires toujours quelques peu restrictives, et quelques mois seulement après les Jeux olympiques, on ne peut pas dire que le public ou les meilleurs athlètes se soient précipités pour venir à l’AccorHotels Arena. Néanmoins, est-ce une édition au rabais ? Certainement pas ! Le Japon, la Russie ou encore la Mongolie ont répondu présents pour le plaisir des spectateurs et des judokas.
Pour ces grandes nations, les staffs ont décidé de panacher entre judokas expérimentés et jeunes prometteurs. Côté français, on retrouve par exemple Cyrille Maret (+100 kg), 34 ans et trois fois vainqueur dans la capitale, aux côtés de Romain Valadier-Picard (-60 kg), 19 ans et en bronze aux championnats du monde juniors la semaine dernière.
À l'arrivée, ce sont quatorze médailles pour l'équipe de France, dont certaines font présager de très belles choses.
Jour 1 – Vers une génération dorée ?
22 ans et demi. C’est environ la moyenne d’âge des vainqueurs des catégories légères du premier jour de compétition. Sur sept catégories en lice, seule celle des -63 kg a été remportée par une judokate de plus de 25 ans.
En l’espèce, c’est l’expérimentée Portugaise Barbara Timo (30 ans), vice-championne du monde 2019, qui s’impose à Paris. Dans cette catégorie, le meilleur classement français sera à l’actif de Manon Deketer qui finit 3e, quand toutes ses compatriotes calent au second tour.
Même médaille pour Orlando Cazorla et Walide Khyar en -66 kg. À 21 ans, le premier découvrait son premier grand tournoi international séniors et fit montre d’une grande détermination dans ses combats. Battu en quart de finale par le Japonais Fujisaka, futur finaliste, il se débarrassa – avec la manière – des deux Mongols engagés dans la catégorie pour s’adjuger le bronze.
Plus habitué de l’international, Khyar s’essayait à une nouvelle catégorie, peut-être pour s’y installer de manière durable. Après avoir remporté son quart de tableau, il s’inclina en demi-finale contre le même Japonais avant d’offrir au public parisien un combat plein de suspense contre le virtuose Moldave Vieru, qu’il remportera après près de 9 minutes d’opposition.
C’est finalement le Japonais Tanaka (19 ans), qui remportera la catégorie devant son compatriote Fujisaka (25 ans) pour fêter sa première compétition internationale.
Chez les -60 kg, c’est également une troisième place qui vient récompenser Romain Valadier-Picard. Performant chez les jeunes, le champion d’Europe junior 2021 s’invite chez les « grands » en battant notamment son compatriote Richard Vergnes (26 ans), régulièrement sur les podiums nationaux. On notera également la 7e place de Maxime Merlin (23 ans), que l’on aimerait revoir sur le circuit sénior avec son judo explosif et assez peu récompensé pour sa projection spectaculaire face au Japonais Koga en repêchage.
Merlin / Koga – Repêchage -60 kg
© Di Feliciantonio Emanuele / IJF
La surprise du jour est venue du côté des -73 kg. Dans cette catégorie très dense, où les Français ont du mal à s’exprimer, deux sur quatre arrivèrent en demi-finale. D’un côté, Guillaume Chaine (30 ans), le représentant habituel français, qui remporta son quart de finale en battant notamment le Roumain Raicu, 19e mondial.
Si l’on attendait face à lui le Mongol Tsend-Ochir (25 ans), 3e des derniers Jeux, ce fut finalement le Japonais Kenshi Harada (23 ans). Et c’est ce dernier qui fila vers la finale, après avoir déroulé le Français sur le dos. Dans l’ultime combat pour la médaille, le Français subit malheureusement la loi de l’Azerbaidjanais Heydarov, le laissant à la 5e place.
De l’autre côté, c’est Théo Riquin (22 ans) qui se retrouva dans le bloc final, après avoir écarté le Russe Iartcev (31 ans), médaillé de bronze aux mondiaux 2019. Ce même Russe qui avait battu au tour précédent le Japonais Hashimoto, champion du monde 2018. En demie contre le Tadjik Makhmadbekov, 17e mondial, Riquin se montra le plus adroit en profitant d’une attaque de son adversaire pour le contrer et rejoindre la finale. Face au Japonais Harada, il ne put cependant pas rééditer l’exploit et s’inclina après avoir été immobilisé pendant le temps imparti.
La jeunesse prima également sur l’expérience chez les filles en -48 kg et -52 kg. Ainsi, chez les plus légères, la Japonaise Wakana Koga (20 ans) régla le podium en battant les trois Françaises qui l’accompagnait. En finale, c’est Mélanie Clément (29 ans) qui tenta de lui résister mais fut immobilisée dans la première minute. Shirine Boukli remonta les repêchages pour rempoter le bronze face à la Serbe Nikolić, juste avant que Blandine Pont ne s’impose face à la Portugaise Costa après sa demi-finale perdue.
Du coté des -52 kg, Astride Gneto subit la loi de l’Israélienne Primo, déjà médaillée aux championnats du monde à seulement 21 ans. Autre jeune qu’il faudra suivre, la Française Chloé Devictor (19 ans) qui finit 5e ce samedi après avoir été auréolée du titre de championne du monde juniors dix jours auparavant.
Enfin, la catégorie des -57 kg fut la seule de ce samedi où la France était absente du podium. Multiple médaillée en Juniors chez les -52kg, Faiza Mokdar s’incline aux portes de la médaille de bronze face à la Belge Libeer, tombeuse d’une autre Française Martha Fawaz au combat précédent.
Pas plus de réussite pour Priscilla Gneto, 30 ans et médaillée de bronze à Londres, qui subit la loi de la Géorgienne Lipartielliani, laquelle a soufflé ses 22 ans en septembre.
Jour 2 – Les favoris retrouvent leur place
S’il fallait être complètement honnête, il faudrait reconnaitre que les catégories de ce deuxième jour étaient un peu plus denses en talents. On retrouvait pléthore de médaillés mondiaux comme le Belge Casse (-81 kg), la Croate Matić (-70 kg), les Japonais Fujiwara (-81 kg) ou Murao (-90 kg), etc. Moins facile de se frayer un chemin jusqu’au bloc final donc, mais pas impossible.
Côté français en -81kg, c’est Tizie Gnamien qui tire le mieux son épingle du jeu en frôlant la médaille de bronze. Bien dans son combat, il mènera pendant une minute avant de se faire plaquer sur le dos par son adversaire mongol. Avant cela, il n’avait été défait que par le Géorgien Tato Grigalashvili, vice-champion du monde, 5e à Tokyo et en argent aujourd’hui.
C’est le Japonais Sasaki, plutôt rare sur le circuit, qui repart avec l’or de Paris en ayant battu le jeune Français Aregba au premier tour, mais surtout le champion du monde belge Casse en quart.
Les deux autres Français de la catégorie, Baptiste Pierre et Alpha Oumar Djalo, connurent le même sort en échouant au second tour. Leurs bourreaux respectifs, le Japonais Fujiwara et le Mongol Gereltuya, finiront la journée en bronze.
Le schéma fut identique dans la catégorie supérieure des -90 kg. On retrouve encore un Français qui sort du lot, pour se hisser en demi-finale. C’est Alexis Mathieu qui représente alors les espoirs français, malheureusement stoppé aux portes de la finale par l’expérimenté Russe Khalmuzraev. En place de trois, il sera aussi barré par le Géorgien Maisuradze, déjà médaillé sur les championnats du monde 2019.
Tirage compliqué pour les autres Français puisque Francis Damier sera sorti par le Portugais Egutidze, 3e aux derniers mondiaux et 3e aussi à Paris. Devant ce dernier, le Russe Khalmuzrev donc, qui avait auparavant sorti Maxime-Gael Ngayap Hambou, et au sommet du podium le Japonais Nagasawa qui avait éliminé Aurélien Diesse.
Et puisque jamais deux sans trois, la catégorie des -100 kg ne changera pas le compteur des médailles. Il y eu pourtant de l’espoir en début de journée, quand Cédric Olivar se débarrassa du Japonais Kentaro Ida d’un sublime mouvement de jambe. Puis il du faire face au Russe Adamian, futur vainqueur de la compétition, contre lequel une blessure au doigt l’obligea à abandonner le combat. Direction les repêchages pour le tricolore, avec un combat contre le brésilien Lima qu’il expédia en moins d’une minute. L’issue fut toute autre en place de trois face au longiligne Hollandais Catharina qui ne lui laissa aucune chance sur un contre, ce même Hollandais qui s’était défait de Clément Delvert en quart de finale.
Les deux autres français, Nicolas Pavloski et Khamzat Saparbaev découvraient ce niveau de compétition et ne purent aller plus loin que le second tour.
Le constat fut le même du côté féminin, voire pire, puisqu’aucune des Françaises engagées ne figura dans le tableau final. Chez les -70 kg comme chez les -78 kg, les podiums furent trustés par des habituées des grands rendez-vous. On retrouve donc la Japonaise Niizoe au sommet des -70 kg, déjà 2e l’année passée, devant la championne du monde en titre Matic.
Dans la catégorie du dessus, c’est la médaillée de bronze des Mondiaux 2018 Babintseva qui prend l’or pour la Russie, après sa victoire contre la Japonaise Takayama.
Les réjouissances se trouvèrent dans les catégories les plus lourdes de chacun de genres. En +100 kg, Cyrille Maret et Joseph Terhec se retrouvèrent face à face en demies, après avoir chacun remporté leur quart de tableau. Et c’est le triple vainqueur de l’épreuve qui sorti vainqueur du duel, s’ouvrant la porte à un quatrième sacre. Il fut même proche de l’obtenir, après avoir marqué au Russe Tasoev un avantage précieux en finale, grâce à l'un des mouvements les plus connus du judo, la « planchette japonaise » (Tomoe nage, en version originale).
Mais le Russe, champion d’Europe en titre, avait de la ressource et parvint à recoller au score avant de finalement immobilier le Français et remporter ce combat disputé.
Maret / Tasoev – Finale +100 kg
(c) Sabau Gabriela / IJF
Une belle médaille pour le Bourguignon qui, il y a tout juste un an, était annoncé à la retraite par les médecins suite à un accident de la route et une luxation de la hanche.
La journée fut également bien conclue pour Terhec, qui remporta son dernier combat sur le fil face au Mongol Odkhuu grâce à un subtil fauchage.
La journée fut quasi parfaite pour les Françaises en +78 kg. Dans une catégorie peu fournie, le tirage au sort s’est montré taquin en opposant les Françaises les unes aux autres dès les premiers combats. Ce sont donc Léa Fontaine et Julia Tolofua qui gagnèrent leur place en demies, que seule la première gagna. Opposée donc à l’Israélienne Hershko en finale, Fontaine ne réussit jamais à trouver son rythme et fut pénalisée jusqu’à l’élimination pour son manque d’attaque.
Dans le combat pour le bronze, Tolofua pris le dessus sur Anne Fatoumata M’Bairo au jeu des pénalités. Quelques instants auparavant, la nouvelle championne du monde juniors Coralie Hayme avait remportée le bronze par forfait, la Portugaise Nunes s’étant blessée au combat précédent.
Venue avec 5 féminines, la délégation israélienne repart avec 3 médailles dont deux titres, un joli ratio. C’est comme souvent le Japon se taille la part du lion en empochant sept médailles d’or. Privilège du pays hôte, la France avait pu engager ce weekend quatre combattant(e)s par catégorie. Une aubaine pour des jeunes talentueux que l'on a hâte de voir confirmer, et qui, chez les garçons, pourraient replacer la France comme nation majeure. Malgré tout, cette équipe de France avait surement les moyens de faire un peu mieux, et on pourra être déçu de l’absence de titre.
Mais les occasions de se rattraper seront nombreuses dans un calendrier dense, où le staff français aura à arbitrer entre qualité et quantité.