Jusqu’à fin janvier, avant d’embrayer sur une nouvelle saison de Formule 1, la rédaction Sports Mécaniques va tirer les conclusions de cette saison 2020 très palpitante. De Williams à Mercedes, plusieurs mondes d’écart existent, avec des ambitions totalement différentes. Il est temps pour chaque écurie d’être passée au crible, afin de voir ce qui a pêché, ce qui a été bien réalisé, ce qui aurait pu être mieux fait. Nous débutons aujourd'hui avec Williams Racing, bonne dernière au classement constructeur, et qui a encore peiné à produire une monoplace de bonne facture.  

Williams déçoit encore (10e, 0 point)

Coup d’oeil dans le rétro

Fin 2019, Williams est au fond du gouffre. Les rumeurs de rachat de l’écurie s’amplifient, et rien ne garantissait la présence des Williams FW43 au départ en Australie, puis en Autriche. Heureusement pour l’écurie, le pire n’arriva pas. En revanche, sur l’asphalte, on ne s’attendait guère à une nette amélioration. 

L’année dernière, nous annoncions un progrès, dû surtout au gain d’expérience de Russell. Le Britannique a prouvé qu’il avait pleinement sa place en F1. Son coéquipier Latifi a certes progressé, mais a été incapable de battre son coéquipier en qualifications. L’écart avec les Haas et les Alfa Romeo devait être grand, voir insaisissable. Avec des pilotes plus expérimentés au volant des concurrentes, l’accession à la Q2 semblait peine perdue. 

Le résumé de la saison

Russell et Latifi au GP de Styrie, le 5 Juillet 2020. Crédits photo : Imago / PA Images

Coup de chance pour Williams, le moteur 2020 de Ferrari est extrêmement mal né. Du coup, ses deux concurrents directs ont été grandement handicapés dans leur quête d’amélioration. Tout au long de l’année, Russell a réussi à s’extirper de la Q1 à de nombreuses reprises, se plaçant même 12e en Hongrie sur la grille de départ. Pour autant, l’objectif principal de Williams, c’est à dire marquer au moins un point, n’a pas été atteint. Fortes d’un bloc Mercedes pourtant performant, les Williams n’ont pas réussi à capitaliser dessus. Plusieurs fois, les pilotes ont échoué aux portes des points. Sans jamais les franchir. 

Dans une année très dense en terme de GP, condensée de juillet à décembre, l’écurie Williams n’a pas démérité, n’a pas donné l’impression d’être complètement perdue. Mais le fait de ne pas marquer de point et de finir derrière Haas et Alfa Romeo est fatal au bilan de Williams. À Monza, une passation de pouvoir a eu lieu, Claire Williams laissant les clés à un fond d'investissement (Dorilton Capital). Pour ainsi dire, cela signait la fin de l’entreprise familiale. Concernant la survie à long-terme de Williams Racing, cela était nécessaire. Pour l’histoire, cela frappe un grand coup, la fin des écuries traditionnelles. 

10e au championnat constructeur, 0 point, voilà ce à quoi ressemble la saison d’une écurie du fond de classement. En résumé, Williams n’a pas autant déçu que l'année dernière, car l’écurie n’aurait pas franchement pu espérer mieux. Il y a eu quelques GP bien maîtrisés (Portugal, Hongrie, Italie, Bahreïn), d’autres franchement plus compliqués. Au fil de la saison, on a même pu s'apercevoir que l'écurie était la seule de fond de classement à améliorer ses temps par rapport à l'année passée. À plusieurs reprises, l'équipe basée à Grove gagnait 1 seconde voire plus. Encourageant pour le futur, qui verra peut-être (sûrement) Williams marquer des points. Il faudra dans tous les cas faire mieux l’année prochaine, pour ne pas enchaîner encore une saison moyenne (ou médiocre). 

Des pilotes aux antipodes

George Russell – 18e, 3 points

Ne vous méprenez pas, il n’y a pas d’erreur. Russell a bien 3 points, mais ceux-ci comptent pour Mercedes. Pour autant, le Britannique aurait bien mérité d’en rapporter au moins un à Williams, tant il s’est débattu toute l’année. Bien plus talentueux que son coéquipier, qu’il a complètement sur-dominé, il a su se donner les moyens de briller avec une FW43 dans les mains. Sa saison débute bien, même s’il abandonne pour des problèmes mécaniques en Autriche. Le week-end d’après, il domine largement son coéquipier, tout comme en Hongrie et en Grande-Bretagne, sur ses terres. C’est en Hongrie, sur le Hungaroring, qu’il réalise la meilleure qualification de la saison de Williams, se classant 12e. Sur un circuit qui ne fait pas la part-belle aux moteurs, c’est un petit exploit qu’a réalisé le pilote de la filiale Mercedes. Sûrement l’un de ses plus beaux souvenirs cette année. 

Côté déception, Russell doit encore ressasser son accident stupide, sous voiture de sécurité, à Imola. Alors qu’il était en bonne voie pour marquer le point de la 10e place, George s’est sorti tout seul de la piste. Il provoquait dans le même temps les moqueries de bon nombre de suiveurs. Ceux-ci ont assimilé cette erreur à celle qu’avait commise Grosjean en Azerbaïdjan. Son GP de l’Eifel est également à oublier. Il s’accrocha au 12e tour avec Räikkönen, suite à une manœuvre un peu trop audacieuse du Finlandais. Sa monoplace, trop abîmée à l’arrière droit, le contraignait à l’abandon. 

Son passage chez Mercedes aura été une véritable bouffée d’air frais pour ce pilote qui mérite une monoplace tellement plus compétitive. Bien que son aventure chez l’écurie championne du monde ait mal fini, nul doute que Russell fera tout son possible pour y regoûter le plus rapidement possible. 

Nicholas Latifi – 21e, 0 point

Première saison pour le Canadien en Formule 1 et que ce fut difficile ! On le sait, l'apprentissage en F1 n’est vraiment pas une chose aisée, Latifi en a fait les frais. L’année dernière, Kubica avait devancé Russell grâce à son point marqué à Hockenheim. Cette année, le coéquipier du Britannique a clairement été battu. En qualifications, Latifi n’a pas fini une seule fois devant son coéquipier. En course, le bilan s’équilibre un peu, mais c’est bien souvent à la faveur d’un abandon du numéro 63. 

Le choix de Latifi a pu surprendre, tant ses saisons en Formule 2 n’ont pas franchement été convaincantes, exceptée celle de 2019 terminée à la 2e place. Il a souvent été dominé par les récents champions de F2 (dont Russell et de Vries) et n’a jamais signé de pole position. Il apporte certes un pécule non négligeable pour une écurie de fond de tableau, mais les retombées sportives ne sont pas encore là. À Sakhir, alors que Russell était momentanément promu chez Mercedes, il a été battu par Aitken, qui lui a fini la course. 

Pour 2021, il faudra espérer que Latifi fasse mieux. Conforté chez Williams avant même son coéquipier, il semble que l’écurie britannique lui fasse confiance. Jusqu'à quand ? La patience du nouveau fond d'investissement aura sûrement ses limites, et les erreurs à répétition du Canadien devront se réduire drastiquement l’année prochaine. 

Jack Aitken – NC, 0 point

Barré chez Renault par Ocon et Ricciardo, Aitken a décidé l’année dernière de rompre son contrat qui le liait à la firme française. Il a alors trouvé refuge chez Williams, qui lui a proposé un poste de pilote réserve. On pensait alors que l’accession à un baquet de F1 semblait de plus en plus compromis pour le jeune Jack, mais le sort en a décidé autrement. 

Après des événements en cascade ayant comme point de départ le forfait de Lewis Hamilton, Russell a été promu chez Mercedes. De fait, une place était vaquante chez Williams, revenant à Aitken. Le vice champion GP3 2017 a enfin pu goûter aux joies de la F1, le temps d’un week-end. Sa course, plutôt anonyme, s’est terminée à la 16e place, juste devant Fittipaldi, autre rookie. 

Coup d’éclat / Coup de blues

Le coup d’éclat : la 12e place en qualifications de George Russell, les 11e places en Autriche, Italie (Latifi) et Toscane (Russell). 

Le coup de blues : l’adieu poignant de Claire Williams à son écurie de toujours lors du GP d’Italie à Monza. 

Le point statistique 

  • 16 – 0 : le score en qualifications entre Russell et Latifi, à l’avantage du britannique. 
  • 8 : en nombre d’années, ce qui sépare Williams de sa dernière victoire en F1 (Maldonando en Espagne). 
  • 152 : en millions d’euros, le montant qu’a déboursé Dorilton Capital pour racheter en intégralité Williams Racing. 
  • 43 : après 43 ans à la tête de son écurie, la famille Williams a donc tiré sa révérence.

Encore une saison compliquée en définitive pour Williams. Beaucoup de chamboulements, des pilotes pas toujours au top de leur forme, une année difficile à négocier… L'année prochaine, il faudra peut-être compter sur l'écurie basée à Grove pour arracher la 9e place au championnat constructeur à Haas. Pas de quoi se réjouir complètement, mais ce serait déjà une grande avancée. On en attend forcément plus de cette équipe légendaire, qui ne demande qu'à retrouver son lustre d'antan. Prochain épisode à paraître ce Mardi avec le bilan de l'écurie Haas, 9e au classement. 

Crédits photo Une : AFP – Antonin Vincent / DPPI Media