Sextuple tenant du titre dans l’AFC Ouest, les Chiefs de Kansas City ont vu leurs rivaux de division se renforcer grandement durant l’intersaison, remettant en doute leur statut de favori à leur propre succession. À quelques semaines de la Draft 2022, qui pourra rebattre un peu plus les cartes, zoom sur le rééquilibrage des forces en présence dans ce qui pourrait être la division la plus relevée de toute la NFL.
2015 : voilà la dernière année où Kansas City n’a pas trôné sur l’AFC Ouest en fin de saison. Une éternité à l’échelle du sport américain, qui montre bien à quel point les Chiefs ont dominé outrageusement la concurrence au cours des six dernières saisons. Pourtant, et même si Patrick Mahomes est toujours là, la saison 2022 pourrait marquer un tournant dans l’histoire récente de la division, car chaque autre franchise s’est renforcée tandis que les Chiefs ont peut-être perdu en qualité.
Denver Broncos : que Wilson vous bénisse
C’est sûrement le changement majeur dans cette AFC Ouest. Habitué à la dernière place de la division depuis deux ans et à une attaque moribonde depuis le départ de Gary Kubiak, Denver a frappé fort en montant un échange pour récupérer Russell Wilson. Moteur de l’attaque de Seattle depuis plus d’une décennie, le nonuple Pro Bowler arrive avec une mission simple : transfigurer une attaque où les armes sont nombreuses et devenir enfin le franchise quarterback recherché depuis trop longtemps par les Broncos.
Cette arrivée change totalement la perspective du futur de Denver. En effet, avec Wilson et un groupe de receveurs très complet (Jeudy, Sutton, Patrick), l’attaque devient immédiatement une force de la franchise, alors même que c’en était son point faible en 2021. En parallèle, la défense, déjà solide l’an passé (3e défense encaissant le moins de points), n’a perdu qu’un seul cadre, Shelby Harris, envoyé à Seattle dans l’échange pour Russell Wilson. De plus, la franchise du Colorado a su compenser le départ de son meilleur sackeur en signant à prix d’or Randy Gregory et en incorporant D.J. Jones sur sa ligne défensive. Ajoutez à cela quelques retouches, comme les signatures de K’Waun Williams (CB) et Josey Jewell (LB), et vous obtenez une défense, sur le papier, complète.
En quelques semaines, et principalement grâce à l’arrivée de Russell Wilson, les Broncos ont donc changé de dimension en devenant de sérieux prétendants en AFC. Martyrisés par les Chiefs depuis leur prise de pouvoir avec une série de treize défaites toujours en cours, et une dernière victoire qui remonte à l’année de leur victoire au Super Bowl L, Denver semble enfin avoir les armes pour mettre fin à sa série noire. Et récupérer une couronne déjà portée cinq fois de suite entre 2011 et 2015, juste avant que Kansas City ne règne en maître jusqu’à aujourd’hui.
Las Vegas : une star et un projet
Surprenants deuxièmes de l’AFC Ouest l’an dernier avec, à la clé, une qualification en playoffs méritée, les Raiders semblent en passe de débuter un nouveau cycle très prometteur. Après un retour de Jon Gruden oubliable et un intérim salvateur de Rich Bisaccia, les rênes de la franchise ont été confiés à Josh McDaniels. Assistant émérite de Bill Belichick, il incarne ce nouveau projet de la franchise, avec un objectif simple : être une franchise de gagnants. En plus de vingt ans, la franchise n’a été qu’à deux reprises en playoffs, à chaque fois pour voir son parcours s’arrêter en Wild Cards. La dernière victoire en postseason remonte ainsi à 2002, année de la défaite de la franchise au Super Bowl XXXVII (contre les Buccaneers de… Jon Gruden). Une éternité pour les fans de la franchise, et un destin que Las Vegas voudra absolument changer en capitalisant sur son année 2021 surprise.
Plus motivés que jamais, les Raiders n’ont pas lésiné sur les moyens pour marquer une progression dans leur roster. Si l’attaque a principalement connu des retouches, elle a également vécu le principal changement dans l’effectif, avec l’arrivée de Davante Adams au poste de receveur. Réuni avec son ancien coéquipier à Fresno State (NCAA) Derek Carr et détenteur d’un contrat record (141,25 M $ sur 5 ans), l’ancien Packer arrive pour faire passer un cap à cette escouade en difficulté l’an dernier. Las Vegas a également investi massivement sur sa défense, trop poreuse en 2021. Ainsi, Maxx Crosby, leader de ce côté du ballon, a notamment été prolongé, tandis que d’autres noms importants comme Chandler Jones ou encore Darius Phillips et Duron Harmon viennent renforcer les différentes lignes. Sécurisant pour une escouade qui encaissait 25,8 pts par match l’an dernier.
Avec un nouveau coach à leur bord, les Raiders chercheront avant tout à confirmer en 2022. Avec Davante Adams pour renforcer l’attaque et un duo Crosby/Jones pour porter la défense, Las Vegas semble armé pour rester compétitif, même si l’adversité reste féroce au sein même de sa division. Seulement vainqueurs à deux reprises face aux Chiefs sur leurs quinze dernières confrontations, la franchise est, peut-être, la moins armée pour renverser l’ordre établi, preuve de la densité spectaculaire de cette division. Les Raiders ont surpris en 2021 en allant en playoffs, à eux de rééditer cette performance dès la saison prochaine.
Los Angeles : des vétérans pour la maturité ?
C’était sûrement la franchise dont on attendait le plus durant cette intersaison, et les Chargers n’ont pas déçu en effectuant des ajustements intéressants. Franchise en plein développement depuis l’arrivée au poste de quarterback de Justin Herbert en 2020, Los Angeles a un avenir prometteur et doit construire autour de son joyau pour atteindre les sommets. 2021, la première saison de Brandon Staley en tant que head coach, a montré une belle progression en attaque, tout en exposant les lacunes de l’équipe de l’autre côté du ballon. L’intersaison avait donc un enjeu double : maintenir le niveau de l’attaque et renforcer la défense.
À l’heure de faire un premier bilan des décisions du front office, il est assez clair que la feuille de route a été respectée. Offensivement, la principale décision prise fut la prolongation de Mike Williams pour trois ans et 60 millions de dollars, qui vient stabiliser un groupe de receveurs solide où s’ajoute également Gerald Everett au poste de tight-end. Outre cela, rien à signaler en attaque, qui pourra encore être renforcée – notamment sur la ligne offensive – via la draft. À l’inverse, la défense a été largement remaniée, avec l’ajout de vétérans dans tous les secteurs. Obtenu pour une compensation presque dérisoire, Khalil Mack revient dans l’AFC Ouest pour aider Joey Bosa sur le pass rush. Sur les lignes arrières, L.A. a touché le gros lot en signant J.C. Jackson, nouveau cornerback n°1 de la franchise. Ajoutez à cela diverses signatures sur la ligne défensive (Johnson, Joseph-Day) et vous obtenez une défense transfigurée et capable de bien mieux qu’une triste vingt-neuvième place.
En misant sur la suite de la progression de Justin Herbert, les Chargers ont les armes pour franchir un nouveau pallier en 2022. Avec une attaque qui n’a perdu aucun joueur majeur et une défense qui possède plus de certitudes que l’an passé, Los Angeles doit pouvoir se mêler à la lutte pour les playoffs, étape manquée sur le fil l’an dernier. Franchise la plus victorieuse face aux Chiefs ces dernières années malgré un maigre bilan de trois victoires sur leurs seize dernières confrontations, elle est, de loin, la plus accrocheuse récemment, notamment, une victoire et une défaite en prolongations l’an dernier. Los Angeles a peut-être trouvé la recette, aux Californiens de l’appliquer également contre leurs autres rivaux de division.
Où placer les Chiefs ?
Dans cette nouvelle hiérarchie très floue, où se placent les Chiefs ? Peut-être plus bas que là où ils étaient ces dernières années. Pourtant, dans les faits, Kansas City semble loi, très loin même, d’une baisse de régime. Depuis 2016, la franchise possède un bilan hallucinant de 31-5, étant même, comme dit précédemment, invaincue face aux Broncos. Si l’on veut chercher une tendance, on peut tout de même dire que trois de ces défaites sont survenues au cours des deux dernières saisons ; insignifiant par rapport au total mais à noter pour une franchise qui en a perdu sept sur la même période.
Néanmoins, 2021 peut marquer un tournant dans cette période hégémonique de la franchise du Missouri. Pourquoi ? Tout d’abord parce que Kansas City va – vraisemblablement – devoir évoluer sans deux leaders : Tyreek Hill et Tyrann Mathieu. Go-to-guy de Patrick Mahomes depuis que ce dernier est titulaire, Hill a été envoyé à Miami où il a signé un contrat record que les Chiefs ne pouvaient pas lui offrir, préférant signer JuJu Smith-Schuster et Marquez Valdes-Scantling pour compenser son départ. De son côté, Tyrann Mathieu, agent-libre, n’a pour l’instant pas trouvé de point de chute mais les Chiefs ont d’ores et déjà signé Justin Reid pour le remplacer. Sans ces deux hommes, l’attaque et la défense sont, évidemment touchées.
Plus globalement, Kansas City se présentera en 2022 avec quelques doutes. En attaque, si Patrick Mahomes est toujours là, il ne possède que Travis Kelce en cible sûre. De plus, sa ligne offensive a montré de bonnes choses l’an passé et Orlando Brown a reçu le franchise tag pour pérenniser la situation, mais il faudra confirmer cette saison, car mettre Mahomes dans de mauvaises conditions au regard des joueurs qui l’entoure reviendrait à se tirer une énorme balle dans le pied. Du côté de la défense, la perte probable de Mathieu laisse un vide profond dans une escouade qui se retrouve sans leader. Si la défense a agréablement surpris l’an dernier, elle manque encore cruellement de certitudes, notamment chez les cornerbacks où le n°1, Charvarius Ward, a été voir ailleurs. Une intersaison pas vraiment rassurante donc, surtout en comparaison des manœuvres effectuées par leurs rivaux pour réduire l’écart.
Finalement, faut-il s’inquiéter pour les Chiefs pour la saison à venir ? Oui et non. Oui, car la franchise semble s’être affaiblie alors que ses rivaux se sont tous renforcés. Dominer autant que les années précédentes sera difficile, même si loin d’être impossible. Non, car Kansas City possède toujours un argument de choix : Patrick Mahomes. Même esseulé, il reste le meilleur quarterback de la ligue et sera en mesure de se démener pour permettre aux siens de viser les playoffs et conserver le titre de division. De plus, Kansas City peut encore profiter de la draft pour effectuer des ajustements qui seront les bienvenus, notamment en défense. Les Chiefs sont encore loin d’avoir perdu le couronne en AFC Ouest, mais il faudra plus que jamais redoubler de vigilance à l’heure d’affronter des rivaux de division tous prêts à prendre le pouvoir après des années à se faire écraser.
Diminués et face à des concurrents plus féroces que jamais, les Chiefs devront batailler pour conserver leur titre de division. Plus contestés que jamais lors de ces dernières années, les joueurs d’Andy Reid tenteront d’écrire l’histoire en devenant seulement la troisième franchise à remporter sept fois de suite le titre de sa division, après les Rams (7) dans les années 70 et les Patriots (11) de Tom Brady.
Crédit image en une : Jamie Squire/Getty Images