La NFL étant désormais dans une période de pause sans évènements majeurs, replongeons-nous dans son passé. La ligue fêtait ses cent ans cette saison et de nombreux matchs marquants ont jalonné son histoire. We Sport vous propose de revenir sur quinze d’entre eux, et aujourd’hui zoom sur un comeback fou lors d’un match entre Oilers et Bills.

Le Contexte :

Bienvenue en 1992. La NFL entame sa 73e saison régulière et le dernier Super Bowl a été remporté par les Washington Redskins aux dépens des Buffalo Bills. Cette année-là, la distinction est frappante entre les équipes de haut et de bas de tableau. Sur les 28 équipes de la ligue, neuf gagnèrent au moins onze rencontres et huit en perdirent au moins onze.

En AFC, les six équipes qualifiées en playoffs n’eurent au maximum qu’un match d’écart entre elles. En AFC Central, les Oilers de Houston finirent deuxième avec un bilan de 10-6. Forte d’une attaque qui a dominé la ligue sur les yards à la passe (4231) malgré l’absence pendant plusieurs rencontres de son quarterback Warren Moon, la franchise put se qualifier pour les Wild Cards.

Destin sensiblement similaire pour les Buffalo Bills en AFC Est. À égalité en terme de bilan avec les Dolphins de Miami, ils durent se contenter de la deuxième place de la division à cause d’un bilan intra-conférence moins bon. Champion sortant en AFC, les Bills devront donc passer par les Wild Cards et espéreront que leur attaque au sol surpuissante (première de la ligue en terme de yards) leur permettra d’aller loin.

Bills et Oilers allaient donc se retrouver face à face en Wild Cards. Les deux équipes venaient de s’affronter en saison régulière une semaine avant le match en playoffs, et la rencontre s’était soldée par une victoire des Oilers dans leur stade 27 à 3. Au cours de la partie, les Bills perdirent leur QB titulaire Jim Kelly qui fut remplacé par Frank Reich. Reich réalisa un match plus que moyen (11/23, 99 yds, 2 INT) et les Bills entamèrent donc la rencontre en tant qu’outsider.

Le Film du match :

Le calme avant la tempête :

Sous un grand soleil et devant près de 70.000 spectateurs, le coup d’envoi est donné à 12h30 heure locale. Les Oilers ont le ballon en premier et vont très rapidement donner le ton. Sur le premier drive du match, Warren Moon remonte 80 yds en étant presque parfait et lance les hostilités en trouvant Haywood Jeffires pour un TD de 3 yds (7-0). Buffalo répond directement sur le drive suivant en atteignant les 18 yds adverses. Frank Reich ne réussira pas à égaliser mais aura permis à son kicker d’être parfaitement placé pour réduire l’écart (7-3).

Houston déroule son football :

Houston récupère ensuite le ballon et va se montrer littéralement impérial. Warren Moon réalise tout d’abord un drive similaire à celui qu’il a effectué en début de rencontre et finit par trouver Webster Slaughter pour un TD de 7 yds (14-3). Buffalo n’arrive pas à répondre et Moon va continuer son festival. Le QB des Oilers récite son football et ajoute deux nouveaux TD à la passe pour porter le score à 28-3. Au final, Warren Moon termine la première mi-temps avec des statistiques hallucinantes : 19/22, 218 yds et 4 TD. Buffalo est six pieds sous terre et le match semble déjà plié.

La deuxième mi-temps démarre tout aussi mal pour les Bills. Après moins de 2 min de jeu, Frank Reich lance un ballon qui sort des mains de son tight end et atterrit dans celle de Bubba McDowell. Le défenseur des Oilers a le champ libre et file dans l’en-but adverse (35-3). La chance n’est pas du côté des Bills, et le sort va un peu plus s’acharner avec la blessure de Thurman Thomas, running back titulaire.

Comeback is coming :

Avec un duo QB/RB remplaçant, Buffalo va cependant initier un comeback auquel personne ne croyait. Aidé par un mauvais kickoff de Houston, les Bills démarrent dans une position avantageuse et vont rapidement trouver le chemin de la endzone. En effet, Frank Reich remonte une bonne partie du terrain et finit par offrir le ballon à Kenneth Davis pour un TD à la course d’un yard (35-10). Les Bills doivent provoquer la réussite et décident alors de tenter un onside kick… qui passe ! Le kicker Steve Christie recouvre sa propre tentative et Buffalo est directement dans le camp adverse. Quatre jeux plus tard, Reich trouve Don Beebe pour un TD de 38 yds (35-17) : l’exploit est en marche.

Houston récupère le ballon, mais est forcé à punter pour la première fois de la partie. Buffalo récupère le cuir et va tranquillement poursuivre sa remontée. Frank Reich est dans le tempo et trouve finalement son receveur Andre Reed pour un TD de 26 yds (35-24). Houston est dans le dur et le jeu suivant ne va rien arranger. Suite au kickoff, Warren Moon voit sa passe pour Slaughter être déviée et Henry Jones intercepte la balle. Trois actions plus tard, Reich trouve à nouveau Reed et sa franchise revient presque à hauteur (35-31).

Lead & Overtime :

Le rythme se calme légèrement après cette vague de points. Houston et Buffalo n’arrivent pas à marquer sur les séries qui suivent, et ce sont finalement les Oilers qui vont réagir les premiers. Houston retrouve enfin son rythme en attaque et remonte une bonne partie du terrain pour obtenir une position de kick avantageuse. Le kicker Al Del Greco s’apprête à tirer, mais le holder perd le contrôle de la balle et Buffalo en profite pour récupérer le ballon. Les Bills retrouvent du rythme et réussissent à trouver le chemin de la endzone, encore une fois grâce à la connexion Reich/Reed (35-38). Pour la première fois du match, Buffalo est devant à quelques minutes du terme. Néanmoins, Houston n’a pas dit son dernier mot et réussit à frapper un field goal avant la fin du temps réglementaire (38-38). Égalité, il y aura une prolongation !

Houston gagne le toss et aura donc le ballon en premier. Après quelques bonnes passes, Warren Moon va commettre l’irréparable sur sa cinquantième passe du jour. Son lancer est imprécis et Nate Odomes intercepte le ballon. Suite à une combinaison de pénalité sur le retour, Buffalo se retrouve directement sur les 20 yds de Houston. Steve Christie n’a plus qu’à frapper le field goal de la victoire (38-41), et Buffalo peut savourer une victoire inespérée.

L’action marquante :

Le scénario entier du match est mémorable, et une action précise ne sort pas forcément du lot. Néanmoins, un jeu symbolise parfaitement le changement de momentum au cours de la partie. Alors que Buffalo est mené 35-10, Marv Levy, coach des Bills, décide de tenter un onside kick au cours du 3e quart-temps. Ce choix est excessivement osé, mais le cerveau de Buffalo sait parfaitement que son équipe a besoin de provoquer la chance pour avoir un espoir de l’emporter. Le kicker Steve Christie frappe cet onside kick et réussit à le recouvrir lui-même ! À partir de ce moment, Buffalo était inarrêtable et Houston a complètement déjoué.

Et après ?

Sportivement, Buffalo a ensuite pu conserver son titre en AFC, mais s’inclinera pour la deuxième année consécutive lors du Super Bowl XXVII. Les Bills disputeront également le Super Bowl lors des deux années suivantes, mais ne réussirent pas à glaner le moindre titre. De son côté, Houston se qualifia à nouveau en playoffs l’année suivante et porta ainsi son nombre de qualifications consécutives pour la postseason à sept, un record à l’époque.

The Comeback est encore aujourd’hui le plus grand retournement de situation de l’histoire lors d’un match NFL. Moment phare dans l’histoire des Bills, il restera à l’inverse l’une des plus grandes déceptions de l’histoire pour les fans des Oilers (aujourd’hui devenus Titans) qui surnomme cette rencontre The Choke.

Frank Reich fut lui considéré comme le maître des comebacks. En effet, préalablement à cette rencontre, il avait déjà réalisé une performance de ce type en NCAA avec sa fac de Maryland. Alors QB remplaçant, il avait permis aux Terrapins de renverser un retard de 31-0 pour l’emporter 40-42 face aux Hurricanes de Miami. Ainsi, Frank Reich détient le record du plus grand comeback en NFL et en NCAA.

Un tel comeback est un véritable miracle. Cependant, d’autres miracles ont marqué l’histoire de la ligue, comme nous le verrons dans deux jours lorsque nous parlerons du Music City Miracle de 1999.