C’est un homme profondément marqué, en proie à des questionnements existentiels et surtout encore très frustré de n’avoir pas pu se mesurer aux autres cyclistes du monde sur les deux dernières années des causes de récurrents problèmes physiques, qui s’est confié au cours d’une longue interview accordée à Ouest-France. Pour 2022, Thibaut Pinot puisque c’est de lui qu’il dit se veut déterminé et plus que jamais revanchard.
Thibaut Pinot : le renouveau,
Il sera assurément l’un des coureurs les plus attendus de la saison 2022. Lui qui revient dans la lumière après des mois englué dans la pénombre et l’hibernation. Le contexte, Tour de France 2020, Thibaut Pinot est victime d’une grosse chute avec comme corollaire de vives douleurs ressenties au dos. En ce début d’année et avec les pépins physiques désormais loin, le cycliste français va tenter de redevenir celui qu’il était avant cette blessure, c’est-à-dire l’un des tous meilleurs grimpeurs du peloton. Très vite, le coureur de Groupama-FDJ va donner le ton le temps de cet entretien. “Pouvoir refaire mal aux autres et lever les bras”, répond-il sans ambages lorsqu'on lui demande ce qu'il attend de ce retour à la compétition.
Comme une réaffirmation de son ‘’soi’’ après une longue traversée du désert,
“J’ai pas mal de frustration en moi par rapport à tout ça, au fait de ne pas avoir pu exploiter ce que j’avais sous le capot ces deux dernières années. J’espère pouvoir être enfin libéré.” Ce regain d’intérêt pour la compétition, cette envie re-née d’en découdre et de ramener dans son escarcelle ces trophées qui lui ont échappé sur les deux dernières années ne doivent pas être perçus comme un platonique désir de se mesurer à ses collègues du peloton. Thibaut Pinot a également fait part de deux choses d’une importance cruciale à ses yeux, notamment “donner des émotions aux gens qui me soutiennent” et “faire un peu plus de vélo pour moi.” Concernant ce dernier point qui peut-être est encore plus important à ses yeux, il a pris le temps de s’en expliquer.
“Je n’ai pas souvent pensé à moi dans ma carrière, au final. J’ai beaucoup pensé à l’équipe. J’ai toujours eu peur de décevoir l’équipe, sur le Tour notamment. On m’a mis leader et je voulais toujours assumer ce rôle, même à l’entraînement, montrer que j’étais le patron, être sur toutes les courses à 100% pour l’équipe. J’en ai aussi perdu ce besoin de faire du vélo pour moi-même.” En revanche, pour ce qui est de ses ambitions pour 2022, Thibaut Pinot ne se montrera pas aussi prolixe. Le coureur de 31 ans qui n'a pas dévoilé son programme pour la nouvelle année a confié qu'il ne lui restait plus beaucoup de cases à cocher sur la liste qu'il avait dans sa tête au moment de passer professionnel, liste qui ne comprenait pas le port du maillot jaune du Tour de France.
Le maillot jaune et lui,
“Quand je suis passé pro, je m’étais fait une liste d’objectifs. Je les ai presque tous remplis, au final. J’avais coché ceci : être champion de France un jour, gagner sur les trois Grands Tours, gagner le Lombardie et porter le maillot rose sur le Giro. C’est le seul truc qui me manque, c’est le dernier truc qui me manque. Parce que pour moi, le maillot jaune, c’est comment dire… Je reste dans le réel, en fait. Le maillot jaune du Tour de France a toujours été, pour moi gamin, quelque chose de trop grand. Donc, j’ai toujours rêvé de porter le maillot rose du Giro.”
Quid de cette image de coureur et d’homme entièrement à part ?
Pour Pinot, l’objectif est clair et imparable. Il faut performer et marquer les esprits dès la première course de la saison. Cette interview accordée à Ouest-France fut l’occasion propice pour le marteler et annoncer les couleurs. Aussi aura-t-elle servi au coureur de Groupama de perche pour se prononcer sur cette image de coureur et d'homme décalés par rapport à l'époque actuelle. “Je suis en marge de ce milieu. Et même de la société, je crois. Le jour où je serai en retraite, j’éclaterai mon téléphone contre un mur. Répondre à un message, pour moi, c’est une corvée. Appeler quelqu’un, écrire un message, j’ai toujours détesté […] Est-ce que c'est grave d'être différent ? Non, je le vis très bien… Mais je suis contre-nature tout le temps. Je me force, je n’ai pas le choix. Sinon, je ne serais pas là devant vous”, conclut celui qui, après sa carrière de cycliste, souhaite mener à bien “un projet de fermes pédagogiques et de chambres d'hôtels…’’.
Les dés sont désormais jetés et les regards tournés vers l’avenir. Un Thibaut Pinot retrouvé, c’est forcément de bon augure pour la saison du cyclisme français et des chances supplémentaires de trophées sur les différentes compétitions de route à travers le monde.