Aujourd'hui, WeSportFr vous propose de découvrir Pierre Maturana, rédacteur en chef à So Foot et consultant dans l’Équipe du Soir. Parcours, So Foot au quotidien, Ligue 1, il nous dit tout. [cette interview a été réalisée avant le match PSG-Real]
Bonjour Pierre Maturana. Merci d'avoir accepté cette interview. Pouvez-vous nous dire quel est votre parcours et comment êtes-vous arrivé à So Foot ?
J’ai fait l’école de journalisme ISCPA. Je cherchais des stages et dès ma première année, j’ai voulu en faire un à So Foot. Pour la petite histoire, j’ai découvert le magazine lorsque j’étais caissier. J’avais envoyé plein de mails mais ils m’ont dit que c’était impossible car ils avaient trop de monde ; leurs locaux étaient trop petits. On m’a dit de les rappeler un an plus tard. C’est ce que j’ai fait.
J’ai eu Daniel Riolo en intervenant en cours de recherche de stage. Je lui ai dit que je voulais aller à So Foot. Il m’a répondu que le seul moyen était d’aller directement là bas pour enfoncer la porte. J’y suis entré en janvier 2006. Puis en stage, il suffit d’être curieux, débrouillard, de ne pas avoir peur des critiques et de donner de son temps pour véritablement apprendre. Ils m’ont notamment fait appeler des joueurs et ils m’ont aidé à écrire avec un bon style.
“SoFoot a été ma vraie école de journalisme”
Est-ce qu’on peut dire que c’est votre maison ?
Je n’aime pas l’expression « ma maison », mais So Foot a été ma vraie école de journalisme. J’ai été formé là bas, je conçois le journalisme comme ils le conçoivent. Mais à propos de maison, c’est vrai que j’y passe la plupart de mon temps.
Je n’ai pas immédiatement travaillé pour eux. J’ai fait d’autres trucs à coté, comme les Cahiers éco du Parisien. J’ai mis mon nez dans d’autres trucs qu’à So Foot. Je maitrisais le digital et le numérique donc on a peu à peu mis en place SoFoot.com ; on dit parfois que c’est mon bébé, je ne le qualifierais pas comme ça, mais je suis content lorsqu’on dit cela.
Vous avez tellement évolué chez So Foot que vous êtes devenus rédacteur en chef du magazine …
Oui, même si je ne suis pas du tout le meilleur journaliste de So Foot, mais je sais éditer, discuter d’un angle etc.
“Je pense cela comme une chance de pouvoir le faire”
Est-ce que le fait de participer à l’Equipe du Soir a fait évoluer votre carrière ?
Il y a des gens pour qui la télé est un objectif, mais pas du tout pour moi. Certains gens sont faits pour ça et on le voit parfois dès l’école de journalisme : ils savent bien s’exprimer à l’oral par exemple ou ont une certaine prestance. Je comprends donc que pour certains ce soit un objectif. Pour moi, c’est plus une opportunité, mais sous forme de pression. J’ai du apprendre à développer mes arguments de manière plus courte qu’à l’écrit par exemple. Cela m’a permis d’élargir ma palette de journalisme et de travailler une autre facette. C’est une évolution dans le sens où j’ai élargi mon savoir-faire et mes compétences. Cela m’a permis de voir autre chose : lorsqu’on est bien dans une rédaction, on peut avoir tendance à se mettre des œillères et oublier ce que les autres pensent. Cela me permet d’avoir une pluralité de points de vue. Je leur en suis très reconnaissant. Je pense que si je n’avais pas travaillé à So Foot, je n’aurais pas fait l’Equipe du Soir. Je pense cela comme une chance.
Vous préférez donc le format magazine ?
Je préfère toujours So Foot du fait de l’histoire que j’ai avec, mais je n’ai pas envie de faire une hiérarchie. Ils abattent un travail énorme et c’est facile de critiquer un média sans savoir ce qu’il y a derrière.
Pouvez-vous nous dire comment est mis au point un mensuel ?
C’est un processus classique. Nous faisons des conférences de rédaction chaque mois en établissant les thèmes qu’on voudrait aborder. Il nous faut parfois plusieurs heures pour se mettre d’accord. On doit aussi prendre en compte les propositions de l’extérieur. Idéalement, on aime bien prendre de l’avance sur des numéros mais c’est très rare. Ensuite pendant le mois on est en perpétuel mouvement. Il y a toute une phase de commande des sujets et des angles ; parfois il faut essayer de les parfaire pour que ça corresponde à la qualité de So Foot, même si les articles sont déjà très bons. Ensuite vient la maquette qui peut prendre plusieurs jours et nuits. Pour cela, on a quelques journalistes en CDI et des pigistes. On a beaucoup de journalistes titulaires et on peut dire qu’on est un des seuls groupes à pouvoir embaucher.
“Les Français ont le championnat qu’ils méritent”
Est-ce que vous avez un championnat de foot préféré ?
En réalité, je préfère la Ligue 1. Elle est souvent sous-cotée. Moi, ça me touche un peu toujours depuis que je suis gamin. En Ligue 1 il y a des polémiques, des anecdotes, des portraits, mêmes si ce n’est pas toujours extraordinaire. Mais on a quand même un beau PSG, l’année dernière on avait un super Monaco, parfois il y a des périodes où Marseille est bon, Lyon et son centre de formation … On est un championnat où il y a des choses à respecter. On ne peut pas se développer comme une Liga par exemple parce qu’on n’a pas les mêmes règles. Les Français ont le championnat qu’ils méritent : nous n’avons pas de grande culture foot. Ce n’est pas comme en Angleterre par exemple. J’ai vécu quelques temps à Londres et les jours de match, tout le monde est habillé aux couleurs de son club, il y a des sorties en famille et des rituels. Mais ce n’est pas grave de ne pas avoir de culture foot. Chez So Foot, on essaye d’étoffer et d’étancher cette soif que certains supporters peuvent avoir.
“On peut dire que la boucle est bouclée”
D’ailleurs, quels sont vos premiers contacts avec le football ?
Quand j’avais 7-8 ans, en 1993, j’ai vu la finale de Ligue des Champions de l’OM ; c’était le premier match que je regardais. Après, il y a eu Téléfoot, Jour de foot, on m’enregistrait les buts. Le football m’est venu par la télé. Puis il y a eu les jeux vidéo et les Paninis. Il y a eu mes potes, bien sur, avec qui je jouais. C’est le premier sport qui m’a fait kiffer. Je peux regarder le football à n’importe quel niveau. Je peux dire qu’avec certains potes, nous sommes liés par la passion du football. J’ai eu envie de faire du journalisme avec du foot. On peut dire que la boucle est bouclée.
Est-ce que vous supportiez un club en particulier ?
Je ne suis pas très supporter. J’admire les gens qui supportent à corps et à cri. Mais j’ai toujours aimé l’OM pour la folie de ce club, le Red Star car ses supporters sont supers et le projet m’intéresse, et je suis né à Amiens donc les résultats me touchent. A chaque bon résultat, lorsqu’ils montent en Ligue 1 par exemple, je ressens une petite fierté. Je ne suis pas du style à acheter le maillot d’un club. Ce soir [match PSG-Real], je vais regarder le match parce qu’il me plait. J’aurais moins eu envie de regarder Manchester City –Bâle, même s’il va y avoir des but, mais pour mon boulot, je vais le regarder.
“Au début, c’est beaucoup moins sexy”
Quels conseils donneriez-vous à un jeune qui se destine au journalisme ?
Ce qui me semble le plus important, car je vois beaucoup de jeunes qui veulent faire du journalisme mais qui n’ont aucune idée de ce que c’est, c’est qu’il faut s’enlever l’idée des paillettes. Au début, c’est beaucoup moins sexy. Au-delà du foot, en tant que journaliste, on peut travailler pour n’importe quoi. Pour le journaliste sportif, il y a une mission d’information, on n’est pas là pour être supporter, ou alors il faut vraiment l’assumer mais c’est plus compliqué. Il faut être curieux, lire, s’intéresser à plein de choses : la politique, la culture, la société. Aujourd’hui, on a la chance d’être entouré d’informations. On peut voir un documentaire sur Netflix ou encore regarder des longs formats sur internet. Ce n’est pas parce que tu veux faire du foot qu’il ne faut lire que l’Equipe et So Foot. Lire la presse étrangère est aussi intéressant parce qu’ils ont un point de vue différent du notre.
Enfin, que peut-on vous souhaiter pour la suite ?
Que So Foot se porte de mieux en mieux. A titre personnel, qu’on aille loin en Coupe du Monde. Pour les médias, il est toujours intéressant de voir les clubs français aller le plus loin dans une compétition, pour voir le suivi médiatique qui va être fait.
Merci Pierre Maturana pour cette interview et le temps que vous nous avez accordé ! On vous retrouve donc pour le prochain numéro de So Foot et très vite sur la chaine l’Équipe !