Formant l’élite européenne sur League of Legends, les équipes du LEC sont ce qui se fait de mieux sur le Vieux Continent. Au nombre de dix, elles représentent tout autant de structures aussi connues que méconnues du grand public. Pendant que l’intersaison bat son plein autour de la faille de l’invocateur, We Sport vous emmène à la découverte de ces diverses entités qui animent le jeu phare de Riot Games, afin de vous en apprendre un peu plus sur leur place dans l’histoire et l’écosystème actuel de l’esport. Cette semaine, cap sur l’Allemagne pour s’intéresser à l’une des plus anciennes structures esportives encore active : SK Gaming.

Une histoire sur plus de deux décennies

C’est en 1997, année de la mort de Lady Diana, de la victoire en Coupe des clubs champions du Borussia Dortmund ou encore du seul titre en Formule 1 du Québecois Jacques Villeneuve, que débute l’histoire de la structure allemande. Accompagnés de plusieurs amis, les frères Reichert, Tim, Benjamin – tous les deux futurs joueurs professionnels de football, et Ralf, fondent en effet un clan sur le jeu Quake, FPS (First Person Shooter) sorti l’année précédente et aujourd’hui encore considéré comme l’un des plus influents de l’époque. Le nom ? Schröt Kommando, un double clin d’œil : l’un à un membre fondateur du clan qui criait fréquemment « Schröt » en pleine partie, lorsqu’il parcourait la carte fusil en main ; l’autre au film Phantom Commando avec Arnold Schwarzenegger. Cette appellation originale reste encore aujourd’hui présente dans le nom de la structure (abréviée en SK), qui s’est rapidement fait un nom sur la scène allemande et européenne.

Quake et CS:GO comme points d’ancrage

À ses débuts, SK Gaming se consacra exclusivement à la licence Quake, licence qui avait mené à la création de la structure en plein milieu de la Rhur, à Oberhausen. D’abord tournée vers le marché allemand, où elle déniche quelques talents locaux pour se faire un nom sur les trois premiers opus, la structure connaîtra ses plus belles heures de gloire sur Quake 4 (sorti en 2005) autour de joueurs comme le Suédois Johan « toxjq » Quick ou les Américains John « ZeRo4 » Hill et Shane « rapha » Hendrixson – aujourd’hui joueur chez Team Liquid. Jeu de la première heure pour SK, Quake gardera longtemps une part importante dans l’écosystème de la structure, bien qu’aujourd’hui aucun joueur ne soit affilié à l’équipe allemande.

Si Quake a lancé la structure, c’est sur un autre jeu qu’elle construira une grande partie de sa réputation : Counter Strike. Sorti en 2000, le premier opus du jeu de tir à la première personne de Valve attire immédiatement l’attention de SK Gaming qui y lancera son premier roster l’année suivante. En septembre 2001, l’équipe fusionne avec les Geekboys d’un certain Andreas « bds » Thorstensson, qui participera fortement à l’évolution de la structure sur le plan marketing, mais surtout au premier gros coup de l’équipe quelques années plus tard. En 2003, SK réussit en effet à s’octroyer les services du roster Counter Strike des suédois de Ninjas in Pyjamas, signant la naissance de SK.Sweden, l’une des équipes les plus dominantes de l’histoire du jeu. Pendant deux ans, l’équipe qui n’a d’allemande que l’origine – le roster étant entièrement composé de suédois – domine outrageusement la scène compétitive, enchaînant les succès et permettant à SK de se faire une place sur la scène compétitive.

Diversification et prise d’ampleur

Dans le sillage d’Andreas Thorstensson, SK va faire partie des structures pionnières dans l’esport en bien des aspects. Redoutable directeur marketing, il fera de l’équipe allemande la première à offrir des services premium payants à ses fans, via la création de la plateforme SK Insider qui permet aux supporters d’acheter diverses choses en lien avec l’équipe et même de discuter avec les joueurs. L’avance marketing de Schröt Kommando sur la concurrence se matérialise également sur sa professionnalisation rapide à une époque où l’amateurisme règne en maître. Dès 2003, sûrs de la force de leur lineup suédoise sur Counter Strike, les dirigeants marquent un tournant dans l’histoire de l’esport en offrant un contrat à chacun de ses membres. Une révolution qui en dit long sur la place qu’est en train de prendre la structure dans le paysage esportif du début du XXIe siècle.

Si ces avancés sont possibles, c’est aussi grâce à l’apport de sponsors qui font confiance à la structure allemande. S’imposant peu à peu sur la scène, des marques reconnues comme Intel passent des partenariats avec SK, ce qui permit à l’équipe d’Oberhausen de mettre en place des contrats ou d’attirer de nouveaux joueurs.

Dans une volonté de s’ouvrir à d’autres domaines, SK Gaming va peu à peu investir d’autres jeux que Quake ou Counter Strike. En quelques années, des joueurs sont recrutés sur FIFA, où Dennis « styla » et Daniel « hero » Schellase se construiront l’un des plus beaux palmarès sur le jeu, World of Warcraft, Starcraft II, Warcraft III ou encore DotA et même Call of Duty : Black Ops, faisant grandir la structure et lui permettant de s’affirmer comme l’une des structures les plus reconnues et dominatrices dans le monde.

LoL, CS:GO et pérennisation

À cheval entre les deux premières décennies du deuxième millénaire, SK Gaming va connaître ce que l’on peut considérer comme son âge d’or. Entre 2008 et 2012, les Allemands remportent 89 trophées tout jeux confondus, asseyant un peu plus leur emprise sur l’esport européen et mondial. Si elle connaîtra ensuite un léger ralentissement, cela ne l’empêchera pas de se montrer pionnière sur de nouveaux jeux et de continuer à être une excellente équipe sur d’autres. Dès le lancement du jeu en 2010, SK se lance sur League of Legends et en sera l’un des principaux acteurs dans les premières années (voir plus bas). Parallèlement à cela, la structure continue de performer sur Counter Strike et Counter Strike:Global Offensive, enchaînant les rosters de qualité, aussi bien autour de Suédois comme la légende Christopher « GeT_RighT » Alesund qu’autour de Brésiliens il y a quelques années, avant la fermeture de l’équipe. À noter également le passage de Bruce « Spank » Grannec dans la structure, le temps d’asseoir lui-aussi sa domination sur FIFA et de remporter deux titres mondiaux.

En un peu plus de vingt ans, SK Gaming s’est donc installé durablement dans le paysage esportif, et avec succès. Structure pionnière en bien des aspects, elle connût de nombreux succès sur plusieurs jeux, ne se contentant jamais de la réussite obtenue sur quelques licences.

À qui appartient la structure ?

Fondé en 1997 à Oberhausen par les frères Reichert et leurs amis, Schröt Kommando a depuis connu plusieurs évolutions. En septembre 2016, la structure a notamment été rachetée à hauteur de 67% par ESforce Holding, compagnie financée par le milliardaire russo-ouzbek Alisher Usmanov également connue pour être la maison mère de Virtus.Pro, l’une plus grosses structures esportives russes. Néanmoins, le groupe fut contraint de vendre ses parts seulement un an et demi plus tard suite à une nouvelle réglementation de la WESA (World Esports Association), organisation dont fait partie Virtus.Pro, et qui interdit la possession de plusieurs équipes esportives professionnelles.

Par conséquent, en janvier 2019, les parts d’ESforce Holding furent revendues conjointement à Mercedes-Benz et au club de football de Cologne. Ce rachat entraînera ensuite une acquisition de parts décalée pour la compagnie téléphonique Deutsche Telekom, qui acquit 25% de la structure en décembre 2019. Le reste des parts est toujours détenu par Alexander T.Müller, CEO et parmi les fondateurs de la structure. Ces quatre entités, toutes allemandes, se partagent aujourd’hui à parts égales la possession de SK Gaming.

Les parts de chacun des propriétaires de SK Gaming

Ses principaux sponsors

  • Deutsche Telekom (Opérateur téléphonique)
  • Mercedes-Benz (Automobile)
  • ARAG (Assurance)
  • HYLO (Eye lubrification)
  • LIDL (Supermarché)
  • Western Digital (Électronique)
  • Krombacher (Bière)
  • Motorola (Téléphonie)

NB : le sponsoring est, selon les dires du CEO de la franchise, la principale source de revenus de la structure.

La galaxie de la structure

  • SK Gaming (LEC – LoL) Existante depuis 2010

Roster = Jenax, Gilius, Sertuss, Jezu, Treatz*

  • SK Gaming (Prime League – LoL) Existante depuis 2014

Roster = Alois, Eckas, Dehaste, Gadget, Mystiques*

  • Clash Royale Existante depuis 2018

Roster = Flobby ; Morten ; xopxsam ; BigSpin

  • BrawlStars Existante depuis 2020

Roster = xlmSRYRiiKZz ; PedroGuijarro ; Symantec ; Jeton

  • Rocket League Existante depuis 2021

Roster = Yukeo ; Tox ; eekso ; Snaski

Performant sur de nombreux jeux depuis sa création, SK Gaming se limite aujourd’hui à des rosters sur quatre jeux après avoir notamment fermé ses équipes sur CS:GO en 2018 et plus récemment avoir mis fin à sa collaboration avec le 1. FC Cologne sur FIFA en septembre 2021.

Moteur de la structure depuis de nombreuses années, League of Legends possède aujourd’hui deux rosters, l’un en LEC, plus haut échelon européen où SK Gaming possède un slot depuis 2019, et l’autre en Prime League, championnat domestique allemand. Par ailleurs, l’équipe allemande a investi les jeux mobiles depuis 2018 avec un roster sur Clash Royale déjà couronné de succès (Top 3-4 aux Worlds 2019) et un autre, plus récent, sur BrawlStars qui s’apprête à disputer les championnats du monde ce week-end. Brièvement présent sur le jeu en 2016, SK a également profité de 2021 pour revenir sur Rocket League, où l’équipe entend également s’affirmer comme l’une des meilleures d’Europe.

* Les rosters League of Legends pour 2022 n’ont pas encore été confirmés par la structure et ne sont ici que ceux attendus selon les rumeurs.

Son histoire sur LoL

Comme évoqué précédemment, SK Gaming fut l’une des premières structures importantes sur League of Legends, en se lançant sur le jeu dès 2010, après avoir fait l’acquisition du roster I WEAR A CAPE. Avec sa première lineup composée de Zylor, SleazyWeazy, Reyk, Severus et Osaft22, l’équipe prend la deuxième place des World Cyber Games 2010, l’une des premières compétitions majeures sur le jeu. Une place d’honneur qui précédera une victoire aux ESL Major Series 7 contre Fnatic et un premier changement de roster important.

D’ocelote aux LCS EU

Le 8 décembre 2010, SK Gaming recrute l’entièreté du roster de Team Dimegio et s’attache ainsi les services de plusieurs joueurs, dont un certain Carlos « ocelote » Rodrìguez. Autour du midlaner, la structure va construire des équipes compétitives pendant près de trois ans, érigeant indirectement l’Espagnol au rang de star de l’équipe. Souvent placée mais rarement gagnante dans les tournois qu’elle dispute, l’équipe allemande s’affirme tout de même sur la scène européenne comme en atteste notamment sa deuxième place aux EU Regional Finals de la saison 2 (défaite contre Moscow Five en finale). Fort de son statut européen, SK réussit ainsi à décrocher sa qualification pour les Worlds 2012, une compétition qui ne les verra toutefois se classer que Top 11-12, soit à la dernière position du classement.

Fort de ses résultats européens et de son top 3 aux EU Regional Finals en 2012, SK Gaming fut directement invité pour la première édition de la nouvelle compétition européenne mise en place par Riot Games : les League of Legends Championship Series EU. Au programme, dix semaines de compétition entre huit équipes qui s’affrontent quatre fois chacune, afin de déterminer un classement puis de se disputer le titre en playoffs. Toujours autour d’ocelote, mais également avec Kev1n, hyrqBot et la botlane CandyPanda/Nyph, SK Gaming se classe troisième du tout premier split de l’histoire de la compétition, puis échoue au pied du podium en playoffs. Malgré ces performances plus qu’encourageantes, l’équipe ne confirme pas lors du Summer split et termine septième, faisant face à une potentielle relégation pour l’année suivante. Des résultats qui pousseront SK à revoir une partie de son roster et à évoluer sans sa star de la première heure ocelote, parti vers d’autres horizons pour fonder sa propre structure.

Du top à la relégation

Après sa difficile fin de saison 3, SK Gaming signe les vétérans freddy122 et Svenskeren (top & jungle) ainsi que le prometteur Jesiz (mid) pour tenter de relancer la machine. Force est de constater que ces choix furent payants. Après avoir réussi à conserver sa place en LCS EU en battant Supa Hot Crew, puis en remplaçant Nyph par nRated en support, SK fut l’une des meilleures équipes européennes en 2014. Première au Spring split puis deuxième en playoffs, 4e au Summer puis troisième en playoffs, l’équipe allemande fonctionne bien et s’offre une seconde qualification aux Worlds, récompense d’une année aboutie. Si ces Worlds se termineront sur un Top 9-11 et un bilan de (2-4), ils n’arrêteront pas SK qui continuera à occuper le haut de tableau des LCS EU début 2015. Avec Fox et FORG1VEN à la place de Jesiz et CandyPanda, SK Gaming ne perd que trois matchs au Spring split 2015 et semble en mesure d’aller chercher son premier titre dans la compétition. Malheureusement, l’aventure s’arrêtera dès les demi-finales et SK ne réussira pas à arracher la troisième place. Le début d’une fin de saison plus que compliquée.

Après avoir opéré un changement en botlane, CandyPanda retrouvant sa place en tant qu’adc, les Allemands vont couler. Avant-derniers à l’issue du Summer, ils doivent jouer leur survie face à Gamers2, nouvelle structure créée par leur ancien joueur Carlos « ocelote » Rodrìguez. Malgré une rencontre disputée, G2 sortira vainqueur et enverra SK Gaming, présent en LCS EU depuis sa création, vers les Challenger Series. Cette relégation, l’équipe ne s’en remettra pas. Avant-dernier du Spring des EUCS, SK y laisse même sa place après une défaite contre 4G. La structure errera alors sur le circuit allemand jusqu’en 2019, année où elle reviendra dans l’élite européenne en obtenant un slot dans la nouvelle version franchisée des LCS EU, le LEC.

Prime, équipe secondaire

Parallèlement à ses prouesses au plus haut niveau européen au début de la décennie 2010, SK Gaming décide de sponsoriser une équipe du circuit challenger pour tenter de participer aux EU Challenger Series en 2014. Récupérant le roster de Team Kappa Prime, l’équipe performe et intègre les EUCS pour le Summer 2014, où l’équipe allemande terminera première de la saison régulière mais échouera en finale des playoffs contre H2k-Gaming. Obtenant ensuite l’opportunité de participer au tournoi d’expansion pour les LCS EU de l’année suivante. SK Gaming Prime, nom de cette équipe secondaire, change totalement de roster et récupère les cinq membres des unlucky bois afin de maximiser ses chances. Malheureusement, l’équipe bis de SK sortira dès le premier tour, et l’équipe arrêtera de jouer suite à cet échec.

Néanmoins, SK Gaming Prime connaîtra une deuxième occurrence à partir de 2019. Suite à l’accession de SK Gaming au LEC, la structure allemande décide de relancer l’équipe pour la faire participer au Premier Tour, plus haut niveau de compétition en Allemagne. Prime s’y affirmera comme l’une des meilleures équipes du pays, et s’octroiera même une place au segment de printemps des EU Masters 2019, nouvelle compétition secondaire européenne, où les Allemands se classeront deuxièmes (défaite en finale contre Misfits Premier). SK Gaming Prime rejoindra ensuite la Prime League, ligue créée par Riot Games début 2020 dans son projet d’avoir un championnat domestique pour chacun des pays européens. SK y terminera dernier lors des deux splits en 2020, avant, cette saison, de se qualifier à deux reprises en playoffs.

SK Gaming
Les résultats de SK Gaming Prime depuis son arrivée en Prime League (Source : Leaguepedia)

Ses performances en LEC

Membre du LEC depuis sa création, SK Gaming a donc disputé chacun des six splits de l’histoire de la compétition. Néanmoins, l’équipe allemande, aujourd’hui la seule parmi les dix membres de la ligue, n’a jamais réussi à s’affirmer comme une des meilleures équipes du championnat. Qualifiés en playoffs à trois reprises (Spring 2019, Summer 2020 et Spring 2021), les Allemands ont à chaque fois été sortis dès leur premier match. Encore en quête d’une première victoire en postseason, ils devront se remobiliser en 2022 après avoir terminé avant-dernier du dernier split, précédés uniquement par Schalke 04, équipe ayant presque abandonné ce split après avoir annoncé la vente de leur slot.

SK Gaming
Les résultats de SK Gaming depuis son arrivée en LEC (Source : Leaguepedia)

De petit clan sur Quake au siècle dernier à membre du LEC plus de vingt ans après sa création, SK Gaming est aujourd’hui l’une des structures les plus emblématiques d’Europe. Couronnée de succès sur différents jeux, notamment sur Counter Strike ou encore FIFA, la structure allemande fut pionnière en son domaine et reste encore aujourd’hui l’un des noms les plus emblématiques du paysage esportif du Vieux Continent.

Rendez-vous la semaine prochaine pour s’intéresser à l’une des structures les plus emblématiques de l’esport européen, Fnatic.

Crédit image en une :